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France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique. Traduction d'articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne.


Hassan Nasrallah: “Israël va sans doute nous attaquer cet été et vous pourriez me perdre”

Publié par Gilles Munier sur 24 Avril 2019, 05:22am

Catégories : #Hezbollah, #Liban, #Israêl

Par Elijah J. Magnier (revue de presse - 20/4/19)*

Le dirigeant du Hezbollah Sayyed Hassan Nasrallah croit en la possibilité d’une guerre surprise avec Israël, cet été, au Liban.

S’adressant à ses plus hauts commandants, Sayyed Nasrallah leur a demandé de ne pas cacher la réalité de la situation ni la possibilité d’une guerre à leurs hommes, leurs familles et aux gens des villages et des villes dans lesquels le Hezbollah opère.

“Il se pourrait bien que je ne sois plus parmi vous  très longtemps ; il est possible que tout le premier niveau du leadership soit tué. Israël peut réussir à assassiner de nombreux dirigeants et commandants. Leur mort n’entraînera pas celle du Hezbollah, parce que notre parti ne s’appuie pas uniquement sur des individus mais sur l’ensemble de la société, qui est un élément essentiel de son existence”, a déclaré Sayyed Nasrallah pendant le meeting. Il a ajouté que “des mesures et des procédures ont déjà été décidées pour répondre à la situation la plus grave (l’assassinat d’un membre du haut-commandement y compris celui de Sayyed Nasrallah lui-même).”

L’équipe qui protège le dirigeant du Hezbollah impose des procédures de haute sécurité à tous les visiteurs, quel que soit leur grade ou leur fonction. Aucun téléphone portable ou sonnerie ou objet personnel n’est autorisé. On les leur enlève avant d’arriver sur le lieu de la rencontre. Les commandants se rassemblent dans des lieux toujours différents et y sont transportés dans des autobus à rideaux noirs pour qu’ils ne n’identifient pas l’endroit où Sayyed Nasrallah les rencontre. A la fin de la réunion, l’équipe de sécurité personnelle de Sayyed Nasrallah l’emmène avant que les autres ne sortent.

“Il y a de fortes indications que cette guerre va prendre tout le monde par surprise, comme la guerre de 2006. Netanyahou (le premier ministre israélien) se prépare, contrairement à (l’ancien Premier ministre Ehoud) Olmert qui était indécis et qui a pris une décision mal préparée en juillet (2006). Israël peut tous nous surprendre comme il l’a fait à Gaza en 2008, dans le but d’éliminer une fois pour toutes la menace qui pèse sur ses frontières. C’est ce que les nôtres (les alliés du Hezbollah) doivent savoir, et ils doivent désormais se préparer au pire scénario”, a déclaré Sayyed Nasrallah.

Le Hezbollah estime qu’après avoir formé son gouvernement, Netanyahu aura une occasion unique d’attaquer le Hezbollah parce qu’Israël n’aura peut-être plus jamais la chance d’avoir à Washington un président qui, comme Trump, lui offre (à Netanyahou) un soutien sans limites.

Le Hezbollah estime qu’en cas de guerre, Israël pourrait déplacer et réinstaller ailleurs les colonies et les villages israéliens limitrophes du Liban, de Naqoura jusqu’aux fermes de Chebaa, pour empêcher le Hezbollah de prendre des otages israéliens de l’autre côté de la frontière. Mais si le Hezbollah s’y risquait, Israël laisserait sans doute les combattants du Hezbollah avancer avant de les encercler. C’est ce qu’on appelle une stratégie défensive mobile, qui a pour but de détruire les forces attaquantes.

“C’est la première fois que Sayyed Nasrallah évoque une aussi sombre perspective, en faisant passer les chances que la guerre éclate de 50/50 à 70/30”, a déclaré une source bien informée.

Personne au sein de la direction du Hezbollah ne sait exactement ce que sera la prochaine guerre avec Israël. La première évaluation est simple : On s’attend à ce qu’Israël détruise entre 1000 et 2000 cibles dans les premiers jours de la guerre. Le commandement militaire israélien estime qu’il est possible d’éliminer la menace du Hezbollah, estime Sayyed Nasrallah.

Il ne fait aucun doute qu’Israël déclenchera immédiatement une guerre s’il parvient à localiser Sayyed Nasrallah. Dans ce cas de figure, l’opinion publique israélienne accepterait probablement la guerre, malgré la crainte des terribles représailles du Hezbollah.

En présentant l’avenir avec ce pessimisme, Sayyed Nasrallah veut alerter ses commandants sur la nécessité de prendre de grandes précautions, de rester sur le qui-vive dans l’attente d’une attaque soudaine, et d’informer les gens avec qui ils vivent. Il pense que les Israéliens, les Etats-Unis, les Britanniques et de nombreux Etats arabes pourraient participer à la guerre à venir, ce qui donne une indication de l’ampleur des destructions du prochaine round. Sans compter que le Liban traverse une grave crise économique et que la population aura du mal à supporter une guerre dévastatrice. Et que le Moyen-Orient entre dans une nouvelle configuration, avec Israël qui élargit ses relations avec des pays arabes qui lui offriront des fonds et des renseignements en cas de guerre contre les partenaires de l’Iran au Liban.

En ce qui concerne le Hezbollah, son arsenal semble suffisant. Il a assez de ses précieux missiles pour soutenir une longue guerre contre Israël et lancer des centaines de roquettes et de missiles tous les jours. Le Hezbollah s’est assuré qu’aucun missile ne se trouve à proximité d’installations civiles afin d’éviter d’avoir des victimes et des pertes financières. Selon certaines sources, les travaux souterrains dans le sud du Liban rappellent les tunnels sous Paris qui ressemblent à du Gruyère. Financièrement,

Le Hezbollah n’a plus besoin d’autant de fonds maintenant que sa présence sur la ligne de front en Syrie est considérablement réduite.

Est-ce qu’Israël tolérera la présence d’une armée irrégulière hautement qualifiée, organisée et expérimentée à ses frontières alors que le Premier ministre Netanyahou a changé de stratégie militaire ?

Sayyed Nasrallah pense que Netanyahou ne poursuit plus la politique de David Ben Gurion qui se contentait de déplacer la bataille dans le territoire ennemi. Il veut éliminer les menaces partout dans la région. Sous Netanyahou, l’armée de l’air israélienne a bombardé l’Irak (les forces de sécurité irakiennes d’Hashd al-Shaabi) à la frontière avec la Syrie. Chaque fois qu’il a perçu la présence d’une cargaison d’armes sophistiquée, il a immédiatement bombardé quelles qu’en soient les conséquences. Il a détruit des entrepôts et des armureries en Syrie pour handicaper l’armée syrienne. De plus, Netanyahou vit aujourd’hui dans un monde où les armées arabes sont absentes ou détruites : elles ne représentent plus aucun danger pour l’existence d’Israël. Pour Israël, la seule menace qui subsiste est le Hezbollah. Pourquoi Netanyahou supporterait-il plus longtemps une telle menace à ses frontières ?

La Russie, la superpuissance présente en Syrie qui cherche à s’implanter au Liban, ne devrait pas réagir contre Israël sur le terrain. Peut-être à l’ONU, oui. Mais la Russie a intérêt à ce que la Syrie soit affaiblie et ne soit pas dépendante d’un allié fort comme le Hezbollah. La Russie pourrait conclure un accord avec les Etats-Unis sur la Syrie – une fois que le Hezbollah serait éliminé ou affaibli. Il s’agirait d’échanger le départ du président Assad contre Idlib et le nord-est actuellement sous occupation américaine. Un tel marché ravirait Washington et Trump pourrait alors mettre fin à la présence de ses forces en Syrie.

Mais qu’est-ce qui explique ce pessimisme soudain et ce risque accru de guerre au Liban ? Le Hezbollah voit les mouvements de l’US Air Force et de l’US Navy dans la région, le comportement de Netanyahou avec Gaza (où il donne aux Palestiniens ce qu’ils veulent pour qu’ils restent tranquilles – avec l’Egypte comme garant – en cas de guerre contre le Hezbollah), le soutien illimité des Etats-Unis, qui représente une occasion unique pour Israël d’avoir ce qu’il veut, le soutien arabe à Netanyahou, la classification du Hezbollah comme pays terroriste par un plus grand nombre de pays, les menaces répétées de l’establishment étasunien au Liban pour les empêcher de soutenir le Hezbollah, l’inimitié à l’égard de l’Iran des Etats arabes, le durcissement des sanctions à l’encontre des pays du Levant, l’”Accord du siècle” prévu pour cet été, et la victoire de l’extrême droite en Israël.

Mais comment le Hezbollah et l’Iran vont-ils réagir ? Les deux sont sur la défensive et on ne s’attend pas à ce qu’ils prennent l’initiative et attaquent en premier. L’Iran pourrait développer sa capacité nucléaire et surprendre le monde en sortant de son chapeau une arme qui interdirait toute guerre. Mais le Hezbollah ne va pas rester les bras croisés. Il prend des mesures pour contrer les objectifs d’Israël. Il a vidé et quitté des centaines de sites dans tout le pays. Ses dirigeants militaires ont été affectés, les missions attribuées, et des réserves préparées pour le scénario le plus défavorable.

Tout cela risque de coûter cher au Liban. En 2008, le Hezbollah a occupé la capitale Beyrouth quand le gouvernement a voulu perturber son système de communication. Il peut faire beaucoup plus si son existence est en danger.

Telle est la perspective pessimiste des commandants du Hezbollah et ils se préparent au pire. Mais il se pourrait aussi qu’Israël ne prépare nullement une guerre et que cela lui suffise que les Etats-Unis travaillent pour lui en sanctionnant économiquement le Liban, la Syrie et l’Iran. Cependant l’été n’est pas loin, c’est le moment idéal pour Israël de déclencher une guerre pendant que le ciel est clair. Les Libanais pourront-ils profiter d’un été paisible cette année ou doivent-ils se préparer à devenir des réfugiés ?

Traduction : Dominique Muselet

*Source : ejmagnier.com

Elijah J. Magnier est sur Twitter : https://twitter.com/ejmalrai

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