Déferlement militaire de l’OTAN au Liban, sous couverture humanitaire : la résistance et le pétrole dans le collimateur… et le spectre de la Chine
par Leila Mazboudi (revue de presse : Al Manar – 15/8/20)*
Sous couvert de l’aide humanitaire pour le Liban après la double explosion du port de Beyrouth qui a tué près de 180 personnes et blessé plus de 6.000, trois navires de guerre de pays de l’Otan ont été dépêché vers les côtes libanaises.
Le premier qui est arrivé au port de Beyrouth en ruines est le navire de guerre britannique de la flotte royale, le HMS Enterprise.
Le vendredi 14 août, c’est le navire français Tonnerre qui a accosté, avec à son bord quelque 700 militaires, dont « un groupement génie de l’armée de terre d’environ 350 hommes » ainsi « qu’un détachement de plongeurs démineurs de la Marine nationale avec des compétences de travaux sous-marins et d’investigation de zones portuaires ». Auxquels s’ajoutent « des capacités de reconnaissance des accès maritimes et de soutien hydrographie du Service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM) », selon le ministère français des Armées.
Sans oublier les moyens amphibies de débarquement qui sont à bord, ainsi que deux hélicoptères militaires.
Après la France, les Etats-Unis devraient, eux aussi, envoyer un navire de guerre dans les jours prochains.
Ce déploiement massif est d’autant plus suspect qu’il a été accompagné par des visites en boucle de responsables occidentaux au Liban depuis l’explosion du 4 août. La dernière a été celle de la ministre de la défense française Florence Parly, intervenue le jour même de l’arrivée du porte-hélicoptères français. Le jour même c’est le vice-secrétaire américain David Hale qui se trouvait dans la capitale libanaise.
Dans le port de Beyrouth, des équipes occidentales d’investigation se trouvent déjà sur place, des Français, des Allemands, des Italiens et des Américains.
Des équipes militaires pour une aide médicale !
Cette mobilisation n’est pas sans étonner de nombreux responsables et observateurs libanais.
C’est le cas d’un ex-ministre libanais, Hassan Mourad, qui s’est dit surpris par l’envoi de navires militaires pour procurer de l’aide humanitaire au Liban.
« Partout dans le monde lorsqu’il y a des évènements et des catastrophes, les pays dépêchent des équipes médicales et de secours, en provenance de leurs ministères de la Santé, des Travaux publics ou des Affaires étrangères. Sauf au Liban. Ces délégations sont formées de ministres de la défense, d’assistances à bord de vedettes militaires et de porte-avions, des armées internationales, des navires de guerre et des équipes d’enquête », a-t-il tweeté.
Assiéger la résistance
L’expert stratégique militaire le général à la retraite Amine Hoteit tente pour sa part de deviner les raisons de ce déferlement : « Cet attroupement militaire au Moyen-Orient est essentiellement celui des membres de l’Otan, sous prétexte que sa cause directe est l’explosion qui a eu lieu dans le port de Beyrouth et pour fournir des secours », a-t-il dit pour l’agence russe Sputnik.
Selon lui, cette présence militaire est liée au plan du secrétaire d’état américain Mike Pompeo qui date depuis mars 2019, un plan basé sur des objectifs bien précis, « celui en particulier d’assiéger la résistance et de prendre en main la décision libanaise ».
Et M. Hoteit de conclure : « l‘arrivée des navires de guerre occidentaux, français, britanniques et américains sur les côtes libanaises, ne s’inscrit pas dans le contexte de l’aide humanitaire pour le peuple libanais mais dans le cadre des pressions sur les protagonistes libanais hostiles à l’occident et qui tournent dans l’orbite de la résistance ».
Le pétrole et le gaz
Selon un expert autre libanais, cet attroupement militaire des pays de l’Otan porte en lui des visées économiques qui ne sauraient être occultées.
« Nous sommes devant un important marché économique dans la région dont le titre est le pétrole et le gaz il y a un conflit franco-turc et gréco-turc tacite pour l’hégémonie dans la région, l’Iran aussi est intéressé », a expliqué Hicham Jaber le président du centre d’études du Moyen-Orient.
Et de poursuivre : « Les Américains et les Britanniques s’y présentent aussi parce que cette région est le champ d’action des Etats-Unis, d’autant qu’il y a des divergences autour du pétrole entre le Liban et Israël, entre Chypre et la Turquie et Chypre et la Grèce, et autres… Le sujet est essentiellement économique, sous couverture humanitaire ».
Le spectre de la Chine
Dans ce contexte économique, le spectre de la Chine n’est pas non plus à exclure dans cet assaut de l’Otan.
Lors d’une interview avec la télévision al-Manar, deux journalistes libanais, Paul Khalifeh qui est le rédacteur en chef de la revue libanaise francophone Magazine, et Salem Zahrane qui est le directeur du centre d’études médiatiques ont assuré avoir été contactés par d’innombrables journalistes et experts occidentaux qui voulaient s’assurer si le Liban voulait sérieusement se diriger vers l’Est en l’occurrence vers la Chine.
Cette proposition avait été faite en premier par le SG du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah, pour sortir le Liban de sa crise économique.
Elle a été reprise par le chef du gouvernement Hassane Diab, surtout lors de la visite du ministre des AE français, Jean-Yves Le Drian, dont les conditions de l’aide étaient impossibles à exécuter. Et ce, une semaine avant l’explosion du port et la venue du président français Emmanuel Macron en personne.
Ce dernier devrait retourner au Liban le mois prochain !
*Source : Al Manar