Par Mohammed Larbi (revue de presse : El Watan - Algérie - 28.12.14)*
Nous y voilà donc, la récente flambée de violence en Libye serait de celles qui précèdent généralement des pourparlers, chaque partie voulant y aller en position de force. Ce que l’on appelle la logique de terrain. Sauf que l’on ne se bat plus pour des positions, puisque des réservoirs de pétrole sont pris d’assaut. Si ces derniers doivent servir à quelque chose, c’est bien à financer l’effort de guerre, l’ONU nous apprenant que la Libye est devenue un gros client en la matière, en faisant état d’un «afflux d’armes de l’extérieur» malgré l’embargo imposé à la Libye. Une grave révélation en réalité, alors que les différentes factions puisaient dans les arsenaux pris à l’ancien régime, alimentant même les différents trafics dans la région.
Qui fournit ces armes, mais nul besoin de savoir qui les paye, une question élémentaire qui est en même temps un signe de l’aggravation des combats en Libye. Telle est la situation qui y prévaut depuis 2012. La Libye n’est pas la Syrie. Pourtant que de similitudes, sauf en ce qui concerne le nombre de groupes armés — l’ONU en a compté des milliers au pays d’Al Assad. Ce n’est pas non plus l’Irak. En est-on réellement certain ? A vrai dire, ces trois pays arabes connaissent de véritables fractures qui menacent leur existence, mais n’y sont-ils pas déjà, au regard des dégâts jugés irrémédiables causés par des guerres multiples, avec au bout l’hégémonie d’une partie sur les autres ?
Même si les différences sont tout de même nombreuses et parfois fondamentales, ces trois conflits demeurent marqués par les mêmes conséquences. Il s’agit du drame humanitaire et la Libye connaît une situation inédite, avec des milliers de ses habitants attendant une aide internationale. Jusque-là, le pays n’en avait nul besoin, ses moyens couvraient largement ses besoins et même ceux des autres. Mais — c’est l’ONU qui en fait état — les combats ont eu une incidence considérable sur la vie des civils contraints de fuir les zones de conflit, ayant du mal à trouver de quoi se nourrir et satisfaire leurs besoins de base.
Sans rapport avec les millions de réfugiés syriens ou d’exilés irakiens, ce sont tout de même près de 400 000 déplacés depuis mai dernier, ce qui est énorme par rapport à la population totale. Comment donc considérer le rendez-vous du 5 janvier prochain convenu par l’ONU avec les différentes parties libyennes ? Pas la moindre opposition, jusque et y compris dans ce qui a été convenu sur la manière d’aller vers un règlement, autrement dit une feuille de route comportant trois points, avec probablement la mise sur pied d’un gouvernement d’unité nationale. Avec la reprise des combats, leur poursuite et leur intensification devrait-on dire, avec aussi cette course aux armements et aux réservoirs de pétrole, une telle perspective est désormais frappée d’incertitude. C’est bien la spirale infernale.
*http://www.elwatan.com/international/repere-le-piege-libyen-28-12-2014-283171_112.php
Photo: Terminal pétrolier libyen en feu