Par Gilles Munier
Cinglant désaveu pour le gouvernement algérien et les généraux qui dirigent en sous main le pays - et avertissement du Ciel, diront certains - Mourad Dhina, un des fondateurs du mouvement d’opposition Rachad (Droiture) - incarcéré depuis janvier à la prison de la Santé, à Paris - devrait être libéré le 4 juillet prochain qui, comme par hasard, est la date choisie pour allumer les feux d’artifice célébrant le 50ème anniversaire de l’indépendance !
Il aura tout de même fallu six mois, et attendre la fin de la campagne et les résultats des élections législatives en Algérie, pour que la Chambre d’instruction de la Cour d’appel de Paris constate que la demande d’extradition de l’opposant algérien n’était pas fondée. Comme la justice suisse l’avait fait il y a quelques années, les accusations portées contre lui en 2004 - constitution d’un réseau terroriste, achat d’un avion pour assurer la liaison entre les membres de ce dernier - étaient une pure fabrication du DRS, police politique du régime militaro-civil.
Mercredi 20 juin, l’avocat général, Jean-Charles Lecompte, s’est donc déclaré « défavorable » à l’extradition de Mourad Dhina en Algérie, compte tenu des « incohérences », des « approximations » et de nombreuses « discordances » dans les documents transmis. Le magistrat est même allé, jusqu’à qualifier la justice algérienne d’ « ubuesque ». En effet, les documents transmis par la justice algérienne étaient en contradiction avec ceux justifiant la demande d’extradition … Il s’avérait que Samir Hamdi Bacha, l’intermédiaire qui aurait acheté l’avion et qui aurait accusé Mourad Dhina de lui avoir remis les 52 000$ nécessaires, en fait…l’avait mis hors de cause ! Le Tribunal criminel d’Alger avait même acquitté Bacha le 20 juin 2005.
Algérie : Etat de fait
Prenant la parole, Mourad Dhina a déclaré que son procès prouve une fois encore l’absence d’un « Etat de droit » en Algérie, le régime qui y gouverne n’étant qu’un « Etat de fait ». Au-delà de son modeste cas, a-t-il ajouté, des milliers de prisonniers croupissent dans les geôles de son pays, et qu’en matière de justice, la situation est bien telle que l’a qualifiée l’avocat général : ubuesque.
Mardi dernier, justement, l’arrestation à Relizane – à l’ouest d’Alger - de Hadj Smaïn, ancien vice-président de la Ligue algérienne des droits de l’homme (LADDH), 69 ans, en a donné un nouvel exemple (1). Cette personnalité respectée est connue pour son soutien aux familles accusant la milice gouvernementale locale d’avoir fait disparaître plusieurs dizaines de personnes soupçonnées d’appartenir au Front Islamique du Salut (FIS) dissout, entre 1993 et 1997.
(1) L’arrestation du militant des droits humains Hadj Smaïn rouvre le dossier des disparus
http://www.la-laddh.org/spip.php?article1296
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