Par Gilles Munier
Mohamed Morsi*, candidat du Parti de la Justice et de la Liberté – émanation des Frères Musulmans – a remporté la présidentielle égyptienne du 24 juin dernier, au grand dam des pays occidentaux, des Israéliens et d’une poignée de blogeurs du « Printemps arabe » qui n’ont pas dit leur dernier mot.
En Egypte, où la confrérie a été fondée en 1928 par Hassan al-Banna, c’est la première fois qu’un civil est élu… qui plus est : démocratiquement. Mais, pour combien de temps ? Le Conseil suprême des forces armées (CSFA) dicte toujours sa loi. Il a dissout le parlement et décrété que l’élection de Morsi était provisoire. Un nouveau scrutin devrait se tenir après l’adoption de la nouvelle constitution. Pour élire Ahmad Chafiq, ancien Premier ministre de Hosni Moubarak ?
Depuis le renversement du roi Farouk en 1952, le pouvoir est confisqué par les militaires (général Neguib, colonel Nasser, lieutenant-colonel Sadate, commandant Moubarak). Les Frères Musulmans ayant soutenu le coup d’Etat des Officiers libres ont très rapidement été éliminés du champ politique par le colonel Nasser qui leur reprochait, entre autres, leurs relations avec le général Neguib, premier Président de la République. Ils ont été ensuite pourchassés pour avoir tenté d’assassiner Nasser. Plusieurs de leurs dirigeants se sont exilés, d’autres ont été pendus, notamment Sayyed Qotb en août 1966, un des idéologues de la confrérie considéré comme le père du salafisme moderne.
Certains détracteurs des Frères Musulmans sont mal placés pour accuser la confrérie de faire le jeu de la CIA, ayant eux-mêmes servi les intérêts des Etats-Unis pendant plusieurs décennies et continuant à le faire. Au Caire, la partie est loin d’être terminée. Un nouveau round s’annonce.
* Mohamed Morsi, 60 ans, fils d’un paysan pauvre du delta du Nil, a fait de brillantes études au Caire et aux Etats-Unis où il a travaillé un temps pour la Nasa. Elu député en 2000 et 2005, il a été emprisonné pendant 7 mois pour avoir soutenu le mouvement réformiste. Outre son rôle à la direction des Frères Musulmans, il a milité au sein du Comité de résistance au sionisme.