Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique.
Traduction d'articles parus
dans la presse arabe ou anglo-saxonne.
Région de Falloujah : Un millier de personnes détenues dans des conditions inhumaines par le régime de Bagdad
Plus de 1 000 personnes, dont des adolescents d’à peine 15 ans, sont détenues sans inculpation dans des conditions épouvantables dans des centres de détention improvisés dans le gouvernorat d’Anbar, à l’ouest de Bagdad, a déclaré Amnesty International mardi 3 mai 2016.
Le 30 avril, une délégation menée par le secrétaire général de l’organisation, Salil Shetty, a visité un centre dirigé par l’agence de lutte antiterroriste d’Anbar (Mukafahat al Irhab) à Ameriyat al Fallujah, où 683 hommes sont détenus sans inculpation.
Les détenus sont entassés dans plusieurs salles au sein d’un ensemble d’entrepôts désaffectés utilisé comme centre de détention et d’interrogatoire.
« Les détenus sont enfermés dans un espace où ils ont moins d’un mètre carré chacun, en position accroupie jour et nuit, sans pouvoir s’étendre ni s’allonger pour dormir, et sont rarement autorisés à sortir prendre l’air, a déclaré Salil Shetty.
« C’était une vision vraiment choquante – des centaines d’êtres humains serrés comme des sardines et maintenus dans des conditions inhumaines et dégradantes depuis des mois. »
Ces détenus ont été arrêtés dans la rue ou à leur domicile lorsque l’armée irakienne a repris leurs villes, soupçonnés d’avoir collaboré avec le groupe armé se désignant sous le nom d’État islamique (EI), bien souvent uniquement parce qu’ils étaient restés dans des localités contrôlées par celui-ci.
Aucun n’a été inculpé, alors que plusieurs semaines voire mois se sont écoulés depuis leur arrestation. Certains ont indiqué à Amnesty International qu’ils avaient perdu le contact avec leurs proches lorsqu’ils avaient fui les combats entre l’EI et les forces gouvernementales.
Des membres de l’agence locale de lutte antiterroriste qui détient ces personnes ont expliqué à l’organisation qu’ils manquent d’effectifs pour mener les enquêtes sur leurs cas dans un délai raisonnable et de ressources matérielles pour traiter les détenus avec humanité.
L’horrible situation dans laquelle se trouvent ces détenus n’est pas un cas isolé. Plusieurs centaines de personnes sont maintenues dans des conditions similaires dans un autre centre de détention improvisé à Habbaniya, une localité voisine, selon l’agence de lutte antiterroriste.
« Le manque de ressources n’est pas une excuse – ni pour ces conditions inhumaines, ni pour la détention prolongée sans inculpation, qui est symptomatique des graves lacunes de la justice irakienne. Les personnes arrêtées pour suspicion de liens avec l’EI doivent être soit inculpées sans délai d’infractions dûment reconnues par la loi et jugées dans le cadre de procès équitables, soit remises en liberté, a déclaré Salil Shetty.
« Il ne fait aucun doute que l’Irak est actuellement confronté à des problèmes de sécurité sans précédent, avec les attaques meurtrières perpétrées quotidiennement par l’EI contre des civils. Cependant, cela ne décharge en rien les autorités irakiennes de leur responsabilité de protéger les droits humains de tous les Irakiens. »
Amnesty International a enquêté et publié de nombreuses informations sur les multiples crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par l’EI.
L’organisation s’est également rendue dans plusieurs camps abritant des milliers de personnes déplacées à Ameriyat al Fallujah, où des familles ont décrit leur lutte quotidienne pour survivre dans des conditions déplorables. Beaucoup ont risqué leur vie pour fuir des zones contrôlées par l’EI et se retrouvent bloquées dans des camps de fortune où l’aide humanitaire est très limitée, où l’on manque de produits de première nécessité, notamment de nourriture et de médicaments, et où les conditions vont se dégrader encore avec l’arrivée de la chaleur estivale.
« L’Irak est face à une crise des personnes déplacées qui prend des proportions ahurissantes, a déclaré Salil Shetty. Les autorités irakiennes et la communauté internationale doivent apporter de toute urgence une protection et une aide humanitaire aux personnes déplacées et leur permettre d’accéder en toute sécurité à des zones sûres. »