Par Robert Fisk (revue de presse : The Independent - 25/9/11) – Traduction et synthèse : Xavière Jardez.
La semaine dernière aurait dû être pour le président Mahmoud Abbas la plus belle de sa vie. Même le New York Times avait découvert que « l’homme aux cheveux gris dans un costume gris et aux chaussures pratiques émergeait peu à peu de l’ombre ».
Mais cela est stupide : le pâle dirigeant de l’Autorité Palestinienne, qui a écrit un livre de 600 pages sur le conflit qui oppose son peuple à Israël sans utiliser une seule fois le mot « occupation » n’aurait pas eu beaucoup de souci à rivaliser avec le discours pathétique, humiliant d’Obama devant l’Assemblée générale de l’Onu dans lequel il a remis la politique américaine au Moyen-Orient entre les mains du gouvernement israélien et des ses combines.
Car la performance du Président américain qui a appelé à la fin de l’occupation israélienne des territoires arabes, à la fin du vol des terres arabes en Cisjordanie – « les colonies » israéliennes comme il les appelait auparavant- et à la création d’un Etat palestinien en 2011, a été désastreuse.
Comme à son habitude, Hanan Ashrawi, la seule voix palestinienne éloquente à New York, en ce moment, a bien vu : « Je ne pouvais pas croire ce que j’ai entendu » a-t-elle confié à un journaliste d’Haaretz. « Cela sonnait comme si c’était les Palestiniens qui occupaient Israël. Il n’y a pas eu un mot d’empathie pour les Palestiniens ». « Il n’a parlé que des ennuis des Israéliens ».
C’est vrai. Et comme à l’accoutumée, les journalistes israéliens les plus sains ont, par leur condamnation ouverte du discours d’Obama, démontré la couardise des princes des journalistes US.
« Le discours informe, sans imagination du président Barak Obama, » écrit Yael Sternhell, « devant les Nations Unies reflètent l’incapacité du président américain à faire face aux réalités du Moyen-Orient. »
Et à mesure que les jours passeront, nous découvrirons si les Palestiniens répondront à son discours servile par une troisième Intifada ou bien par un haussement d’épaules, de lassitude et de résignation, que tout a toujours été comme ça, que les faits prouvent encore et toujours que l’administration américaine est un instrument pour Israël pour appuyer son refus d’accorder un Etat aux Palestiniens.
Comment se fait-il, demandons-nous, que l’ambassadeur US en Israël, Dan Shapiro, ait fait le voyage de Tel Aviv à New York, dans l’avion de Benjamin Netanyahou ? Comment se fait-il que ce dernier était trop occupé à bavarder avec le président colombien pour prêter attention au discours d’Obama ? Il a seulement jeté un coup d’œil au texte quand il a été face à face à Obama, en direct.
Cela n’était pas du « chutzpah ». C’était une insulte pure et simple. Et Obama l’a bien mérité. Après avoir loué le Printemps/l’Eté/ l’Automne arabe, et tout ce qui se déroule encore, en raison des actes de courage des Tunisiens ou des Egyptiens, comme s’il, lui, avait été derrière le Réveil Arabe, l’homme n’a osé dédier que dix malheureuses minutes de son temps aux Palestiniens pour les gifler pour avoir eu l’audace de demander à l’ONU la création de leur Etat.
Obama a même suggéré – et ce fut la partie la plus comique de sa grotesque déclaration - que les Palestiniens et les Israéliens étaient deux parties « égales » dans ce conflit. Un Martien écoutant ce discours aurait eu la même réaction que Mme Ashrawi, que les Palestiniens occupaient Israël au lieu du contraire.
Aucune mention de l’occupation d’Israël n’a été faite, aucune ni des réfugiés ou de leur droit au retour ou du vol de terres palestiniennes arabes par le gouvernement israélien en violation du droit international. Mais beaucoup de lamentations à propos du peuple d’Israël assiégé, des roquettes tirées sur leurs maisons, des attentats suicides – péchés palestiniens, bien sûr, mais aucune référence au carnage de Gaza, au nombre incalculable de morts palestiniens - et même à la persécution historique des juifs et à l’holocauste. Cette persécution est un fait d’histoire de même que le mal que fut l’holocauste ; MAIS LES PALESTINIENS N’ONT PAS COMMIS CES ACTES. Ce sont les Européens qui ont commis ces actes, européens dont Obama recherche l’appui pour dénier aux Palestiniens leur droit à un Etat. Ainsi, nous étions de retour « aux parties égales » comme si les occupants israéliens et les Palestiniens occupés jouaient sur le même terrain.
Madeleine Albright avait souvent recours à ce mensonge. « C’est selon ce que veulent les parties » disait-elle, en se lavant les mains, tout comme Pilate, de toute l’affaire dès l’instant où Israël menaçait d’en appeler à ses partisans aux Etats-Unis
Titre: AFI. Titre original : A President who is helpless in the face of Middle East reality
Source : article repris par The Independent, Afrique du Sud, 25 septembre 2011.