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France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique. Traduction d'articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne.


Adel Abdel-Mahdi, candidat de la France en Irak

Publié par Gilles Munier sur 24 Septembre 2010, 17:27pm

Catégories : #Irak

Depuis les élections législatives du 7 mars 2010, les 325 députés du Parlement irakien ne se sont réunis qu’une vingtaine de minutes. Malgré les voitures blindées et les gardes du corps mis à leur disposition, certains vivent à l’étranger, estimant que leur sécurité n’est pas suffisamment assurée en Irak. Mais, en fin de mois, ils n’oublient pas de vérifier si leur salaire mirifique a bien été versé ! Dans un pays où le salaire moyen est officiellement d’environ 320 euros, chaque parlementaire aura touché, au 31 octobre 2010, plus de 167 000 euros, sans compter les primes.

En coulisse, les négociations se poursuivent pour désigner le futur Premier ministre. Ces dernières semaines, un accord tacite américano-iranien militait pour la reconduction de Nouri al-Maliki. Mais, Moqtada al-Sadr, grand manœuvrier, l’a fait capoter. Du moins, provisoirement.

Alliance contre-nature

En juillet dernier, après s’être entretenu avec Moqtada à Damas, le pro-américain Iyad Allaoui a profité du mois de ramadan pour se rapprocher une nouvelle fois du Conseil suprême islamique d'Irak d’Ammar al-Hakim, organisation chiite liée quasi structurellement à l'Iran. Au Parlement, l'Alliance Nationale Irakienne (INA), composée des partisans d'Al-Hakim et du courant sadriste, compte 70 députés. En les additionnant aux 91 du bloc Iraqiya et aux élus kurdes - s'il s'entend avec Barzani et Talabani - Allaoui espère rebombir. Depuis la désignation de Adel Abdel-Mahdi al- Muntafiki candidat de l’INA au poste de Premier ministre, Iyad Allaoui se verrait bien Président de la République, un Kurde présidant le Parlement.

Cette alliance contre-nature qui, faute de mieux, satisferait Washington, ne convient pas obligatoirement au régime de Téhéran qui a toujours plusieurs fers au feu. Mais, en France, elle fait rêver la « sarkozie »,  car si Allaoui n’est pas tout à fait en odeur de sainteté à Paris, Abdel-Mahdi y fait figure de pro-français.

Notre homme à Bagdad !

Ancien élève du collège des jésuites à Bagdad, Adel Abdel-Mahdi est passé en vingt ans du baasisme au maoïsme, puis au chiisme safawide militant.

Emprisonné en Irak pour ses idées nationalistes arabes, juste avant le renversement du Président Kassem, il fut libéré par la Révolution baasiste de février 1963 et élu vice-Président de l’Union nationale des étudiants irakiens. Aujourd’hui, Abdel-Mahdi affirme qu’il percevait déjà Saddam Hussein comme un ennemi, et avoue que n’ayant pas l’étoffe d’un héros, en 1969, pistonné par un parent, il s’arrangea pour être envoyé en France poursuivre ses études, et y rester.

L’arrivée de l’ayatollah Khomeiny à Neauphle-le-château, le renversement du Chah, puis l’instauration d’un régime théocratique de type safawide en Iran, lui ouvrirent de nouveaux horizons. Devenu en France communiste, tendance Mao, mais déçu, dit-on, par le PC irakien qui s’était allié au Baas pour gouverner le pays, Abdel-Mahdi adhéra, en 1982, en pleine guerre Iran-Irak, au Conseil suprême de la révolution islamique en Irak (CSRII). Cette organisation fantoche, fondée par Khomeiny pour supplanter le parti islamique Al-Dawa, pas suffisamment malléable au goût de l’ayatollah, manquait cruellement de membres d’origine irakienne pour constituer sa structure et développer son bras armé, la Brigade Badr.

En France, où il revenait régulièrement, ses activités pro-iraniennes ne lui ont jamais posé de problèmes. Bien au contraire, car il aurait servi d’intermédiaire dans les négociations du contentieux Eurodif portant sur la non-livraison à l’Iran de 10% de l’uranium enrichi produit par l’usine d’enrichissement de Pierrelatte. Le régime des mollahs y avait contractuellement droit, grâce au milliard de dollars investi en 1974, par le Chah, dans l’opération.

A Téhéran,  Abdel-Mahdi monta rapidement en grade. Il se retrouva bientôt, de 1992 à 1996, à la direction de la représentation du CSRII à Téhéran. Cette position fit de lui un des opposants au Président Saddam Hussein les plus proches des Pasdaran, les Gardiens de la révolution et explique son élection à la vice-présidence chiite de l’Irak en 2005. Bien qu’à cette occasion Jacques Chirac lui ait adressé une lettre de félicitations particulièrement chaleureuses, ce n’est qu’après l’entretien fort peu diplomatique accordé par Bernard Kouchner, en août 2007, au magazine américain Newsweek qu’il est devenu « l’homme de la France en Irak ». Le ministre y déclarait : « de tous les gens disponibles, il (Abdel-Mahdi) est celui qui devrait être désigné comme premier ministre ». Nouri al-Maliki n’a toujours pas digéré l’affront, malgré les excuses exigées, et obtenues de la part de Kouchner.

Le casse de la banque Al-Rafidain

En Irak, des accusations de gangstérisme poursuivent Abdel-Mahdi depuis le casse de la succursale de la banque Al-Rafidain, dans le quartier de Karrada à Bagdad, le 28 juillet 2009. Ce jour-là, la paie mensuelle des fonctionnaires des forces de sécurité - six millions de dollars - a été dérobée par des hommes armés, commandés par des membres de sa garde personnelle. Bilan : six  policiers protégeant les lieux, tués. Abdel-Mahdi a beau clamer son innocence, rien n’y fait. Les soupçons demeurent d’autant plus que l’argent a été retrouvé au siège de son journal : Al-Adala (La Justice, en arabe !). Depuis, l’affaire a été étouffée et un des chefs du commando s’est réfugié en Iran.

Nicolas Sarkozy et « son » ambassadeur à Bagdad n’ont pas de raison de pavoiser. Si le vice-Président irakien est élu Premier ministre – ce qui est loin d’être certain - les contrats ne tomberont pas en pluie dans l’escarcelle du patronat français. En avril 2009, à Paris, Adel Abdel-Mahdi avait assuré que la compagnie pétrolière Total avait « une très bonne chance d’obtenir un bon contrat en Irak ». On connaît la suite : nada ! Cela donne une idée de sa marge de manoeuvre entre les mains du grand marionnettiste iranien : quasiment nulle.

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