Le camp de personnes déplacées de Laylan, dans le gouvernorat de Kirkouk, en Irak, juillet 2020. © Tetyana Pylypenko/MSF
Revue de presse : Médecins Sans Frontières (25/11/20)*
Depuis octobre 2020, environ 25 000 personnes déplacées par les violences ont regagné leur région d’origine en Irak. Le gouvernement a entamé un processus visant la fermeture des camps dans le pays comme celle annoncée du camp de Laylan, où MSF intervient, et qui suscite des inquiétudes quant aux conséquences humanitaires de ces retours précipités.
Lundi 23 novembre au petit matin, des camions sont arrivés dans le camp de Laylan, dans le gouvernorat de Kirkouk, pour ramener les familles qui y vivent dans leurs villes d’origine. Si pour certains des 1,3 million de déplacés que compte l’Irak, le rêve de rentrer chez eux est devenu réalité, pour d’autres le retour est synonyme d’insécurité : beaucoup n’ont nulle part où aller et risquent de se retrouver sans accès aux services de base, dont les soins de santé.
« Même s'ils veulent fermer le camp, ils doivent d’abord se préoccuper de notre sécurité, raconte l’une des femmes du camp. De nombreuses personnes ne peuvent pas retourner dans leurs villages à cause des problèmes tribaux et de l'insécurité. »
Ayant vécu dans des zones précédemment contrôlées par le groupe Etat islamique (EI), beaucoup craignent d'être victimes de violences et d'être arrêtés s'ils sont soupçonnés d'appartenance à l’EI. « Lorsque mes voisins sont rentrés chez eux, ils ont été agressés verbalement et ont dû se cacher, ils avaient très peur d'être blessés », continue la jeune femme.
Dans ces conditions, la décision de fermer prochainement le camp de Laylan, où vivent plus de 7 000 personnes dont la plupart sont des femmes et des enfants, doit être reconsidérée. S’ils devaient être envisagés, les retours doivent impérativement se faire de manière transparente, volontaire et sûre, avec des solutions pérennes pour la population.
« Notre maison a été détruite, il fait de plus en plus froid et nous avons des enfants en bas âge : nous ne savons pas comment nous allons gérer si nous sommes renvoyés chez nous, confie une autre femme. Le camp de Laylan est sûr et ici au moins nous avons accès à l'eau et à l'électricité. »
Le camp a été créé en 2014 après l’éclatement du conflit dans plusieurs villes irakiennes comme Hawija et Salah Al-Din, obligeant de nombreuses personnes à fuir. Les équipes MSF y fournissent des soins de santé mentale, de santé sexuelle et reproductive et suivent les patients atteints de maladies non-transmissibles.
« Nous prenons en charge 300 patients atteints de maladies non-transmissibles dont le traitement ne doit pas être interrompu, explique Gul Badshah, chef de mission MSF en Irak. Avec cette fermeture précipitée, nous n'avons pas le temps de leur fournir trois mois de traitement pour temporiser, ni de préparer leurs dossiers médicaux afin de leur permettre d’être soignés une fois rentrés chez eux. »
Huit cas confirmés de Covid-19 sont actuellement confinés dans la zone d’isolement du camp, ce qui représente une préoccupation sanitaire supplémentaire.
*Source : Médecins Sans Frontières (MSF)
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