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France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique. Traduction d'articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne.


Les légendaires jardins suspendus de Babylone, l’une des 7 merveilles du monde antique, se situaient-ils bien dans cette ville ?

Publié par Gilles Munier sur 20 Mars 2025, 12:17pm

Catégories : #Irak, #Mossoul, #Bagdad

L'archéologue Bekas Hasan devant les bas-reliefs montrant le roi Sennachérib devant des dieux assyriens. Ils ont été dorés et animés pour les besoins du documentaire « Sur la piste des jardins de Babylone ». (Lion TV)

Aucune trace matérielle des jardins de Babylone n’a jusqu’à présent été retrouvée par les archéologues. Des fouilles récentes, entreprises en Irak, dans la région de Mossoul, l’ancienne Ninive, pourraient fournir de nouveaux indices, comme le laisse entendre le documentaire « Sur la piste des jardins de Babylone », diffusé sur France 5 le 20 mars, à 21h55, puis en replay à partir du 20 mars.

Par Véronique Dumas (revue de presse : Historia – 19 mars 2025)*

Le documentaire « Sur la piste des jardins de Babylone » promet une enquête, mais une longue introduction en pose le cadre. Tout commence dans la ville de Mossoul, en Irak, dévastée par les djihadistes de 2014 à 2017. Les membres de l’État islamique se sont, en particulier, acharnés contre les monuments témoins de l’histoire polythéiste du pays datant de l’Antiquité. Le directeur du musée archéologique de la ville, Zaid Ghazi Saadallah, revient sur les destructions méthodiques, filmées par ceux qui les ont perpétrées, des monumentales sculptures assyriennes qui y étaient conservées. Les chefs-d'œuvre, qui n’ont pas été pilonnés au marteau-piqueur ou à la masse, ont été vendus au marché noir pour financer la machine de guerre de Daech. Depuis, des spécialistes, dont l’assyriologue allemand Stefan Maul, tentent sur place de reconstituer les artefacts à partir des fragments conservés.

Un palais enfoui

En parallèle, des fouilles archéologiques ont été menées et sont toujours en cours. C’est le cas sur le site de l’ancienne mosquée qui abritait le tombeau supposé de Jonas, le prophète de l’Ancien Testament, vénéré en Irak sous le nom de Younis. Ce haut lieu de l’islam a été dynamité par les vandales.

Sous ses décombres, les archéologues ont découvert tout un réseau de galeries, qui avaient été creusées, à la pioche, par des habitants de la ville, sur ordre des djihadistes. Ces derniers connaissaient, comme toute la population, la rumeur selon laquelle un palais assyrien se trouvait sous l’édifice et ils ont donc fouillé le sous-sol à la recherche d’antiquités monnayables. Les archéologues, qui ont utilisé ce réseau souterrain, ont effectivement localisé les vestiges du palais et ont trouvé, entre autres, de nombreuses inscriptions cunéiformes. Sur l’une d’elles, est gravé le nom du roi Sennachérib (704 – 681 av. J.-C), qui a été le maître des lieux. Ils ont également découvert des bas-reliefs sculptés représentant de rares portraits de femmes assyriennes, ainsi que des taureaux ailés à tête humaine, les lamassus, placés à l’entrée de la salle du trône. Ces génies protecteurs des rois assyriens, contrairement à ceux qui se trouvaient encore dans la ville de Mossoul, en surface, ont échappé à la destruction.

Les jardins de Ninive

D’autres chantiers de fouilles, explorés au cours du film, ont aussi apporté leur lot de découvertes extraordinaires. À une cinquantaine de kilomètres, au nord-ouest de la ville de Mossoul, l’archéologue kurde Bekas Hasan a exhumé des bas-reliefs dans un remarquable état de conservation – la plus importante découverte de ce type depuis 150 ans. Ils représentent le roi Sennacherib, debout, accueillant une procession de dieux assyriens. Leur présence à cet endroit a intrigué l’archéologue. Il s’est aperçu qu’ils se situaient près d’un canal qui faisait partie d’un vaste réseau d’alimentation, construit à la demande du souverain et qui mesurait près de 400 kilomètres de long et conduisait l’eau puisée depuis les monts Zagros – aujourd’hui en Iran – jusqu’à Ninive.

D’autres vestiges de cette installation hydraulique sophistiquée ont été retrouvés à 40 kilomètres au nord de Mossoul, dont un aqueduc, considéré comme le plus ancien du monde.

Cette gestion de l’eau, si précieuse dans ces régions, a permis l’aménagement de jardins luxuriants dans la capitale de l’empire. Or, l’assyriologue Stephanie Dalley, de l’université d’Oxford, qui intervient à ce sujet, est persuadée que ceux de Babylone se trouvaient en fait… à Ninive. La chercheuse, qui a travaillé sur le sujet depuis les années 1990, s’est fondée, entre autres indices, sur leur description par le roi lui-même et sur le fait que Babylone, située à 500 kilomètres au sud de Ninive, était alors située en Assyrie. Selon cette spécialiste, les auteurs antiques, qui ont vanté les jardins suspendus babyloniens, auraient confondu les deux cités.

Une riche histoire antique

Or, cette théorie est sujette à caution et ne repose sur aucune preuve archéologique tangible. Si l’existence de jardins extraordinaires est attestée depuis longtemps à Ninive, cela ne signifie pas pour autant qu’il s’agissait de ceux de Babylone. Une autre assyriologue, Josette Elayi, écrit dans sa biographie sur le roi Nabuchodonosor (605 - 562 av. J.-C.) que les jardins suspendus devaient se situer dans l’un de ses trois palais babyloniens et indique même qu’il s’agissait de celui désigné sous le nom de « palais du Nord ». Elle précise dans son ouvrage L’Empire babylonien. Entre haine et fascination, qu’ils ont été construits par le roi pour son épouse. Elle reconnaît toutefois que leur origine est à rechercher en Assyrie. « Les jardins suspendus de Babylone, écrit-elle, sont donc un concept assyrien créé par Sennachérib, qui a sans doute été repris par Nabuchodonosor. »
Quoi qu’il en soit, le grand mérite de cet intéressant documentaire est de prouver que les suppôts de Daech n’ont pas réussi à effacer totalement l’histoire préislamique de l’Irak. Quant au débat sur les jardins suspendus, de nouvelles découvertes seront nécessaires pour le trancher.

À noter :

Sur la piste des jardins de Babylone à voir sur France 5 le jeudi 21 mars à 22h et sur france.tv.

*Source : Historia

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