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France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique. Traduction d'articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne.


Iran, Israël, Gaza… Donald Trump a-t-il un plan pour le Moyen-Orient ?

Publié par Gilles Munier sur 11 Novembre 2024, 09:11am

Catégories : #Trump, #Iran, #Gaza, #Israel

Le retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis pourrait bouleverser les équilibres déjà fragiles au Moyen-Orient. L'ombre d'une confrontation directe avec l'Iran plane plus que jamais. Sur Gaza, le président élu affiche une position ambivalente, mêlant soutien indéfectible à Israël et velléités d'apaisement.

Par Bahar MAKOOI (revue de presse : France 24 – 8 novembre 2024)*

La victoire de Donald Trump survient à un moment délicat pour le Moyen-Orient, marqué par la guerre menée par Israël à Gaza et au Liban, sur fond de dérapage possible vers une guerre ouverte avec l’Iran, soutien du Hamas et du Hezbollah.

Alliés indéfectible d’Israël, les États-Unis sous le mandat de Joe Biden ont néanmoins exercé une certaine pression sur le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, le limitant dans ses velléités à frapper les installations nucléaires iraniennes. Un geste qui a évité jusqu’ici l’ouverture d’un front direct avec Téhéran et un embrasement régional.

L’arrivée du milliardaire républicain aux manettes pourrait marquer un tournant. Pour Donald Trump, le véritable problème n’est ni Gaza ni le Liban, mais Téhéran, selon David Rigoulet-Roze, chercheur rattaché à l'IFAS et associé à l’IRIS, ainsi que rédacteur en chef de la revue "Orients Stratégiques".

La "menace iranienne" en commun avec Netanyahu

"Donald Trump partage avec Benjamin Netanyahu une focalisation sur le nucléaire iranien. Il a répété durant sa campagne que l'Iran n'aura pas la bombe atomique. Et le Premier ministre israélien, lui, entend ça comme la possibilité d'une opération contre le nucléaire iranien. D'ailleurs, il a laissé entendre que s'il y avait une réplique israélienne à une nouvelle attaque, elle pourrait désormais viser les sites nucléaires", relève le spécialiste du Moyen-Orient.

Dans le cas où l’armée israélienne déciderait d’attaquer les principaux sites nucléaires iraniens de Natanz et de Fordo – probablement enfouis à plus de 80 mètres de profondeur – ils auraient besoin de l’appui militaire américain. "Les Américains sont les seuls à avoir les munitions pour pénétrer en profondeur à quelque 60 mètres sous terre, avec les GBU 57/A ou Massive Ordnance Penetrator GBU-57A/B (MOP). Ces bombes sont si lourdes qu’elles ne peuvent être transportées que par les bombardiers stratégiques B-52 ou les bombardiers stratégiques furtifs B2, dont les Américains sont les seuls à disposer", détaille David Rigoulet-Roze.

Reste à savoir si Donald Trump osera franchir le pas et donner son feu vert à Benjamin Netanyahu, ce que Joe Biden s’est refusé à faire jusqu’ici. 

Dès mercredi, l’élu républicain et le Premier ministre israélien ont échangé par téléphone de la "menace iranienne", dans la foulée de la victoire du milliardaire, saluée par Benjamin Netanyahu comme un "réengagement puissant dans la grande alliance" entre leurs deux pays. "Votre retour historique à la Maison Blanche offre un nouveau commencement pour l'Amérique et un réengagement puissant dans la grande alliance entre Israël et l'Amérique", a-t-il ajouté dans un communiqué à l'adresse de Donald Trump.

L’échéance de juillet 2025 : fin de l’accord sur le nucléaire

Pour Yonatan Freeman, expert en relations internationales de l'université hébraïque interrogé par l’AFP, "compte tenu de ce que Donald Trump a dit et de ce qu'il a fait auparavant, on s'attend à ce qu'il soit plus dur avec l'Iran".

Lors de son précédent mandat, en mai 2018, le républicain avait retiré unilatéralement son pays de l’accord international sur le nucléaire iranien et rétabli de lourdes sanctions contre Téhéran, notamment contre les secteurs pétrolier et financier. Cet accord prévoyait la levée d'une partie des restrictions internationales contre l'Iran, en échange de son engagement à ne pas se doter de l'arme nucléaire, ce dont Téhéran se défend.

La décision de Donald Trump a eu de lourdes conséquences sur l'économie iranienne et a été un facteur de flambée de l'inflation en Iran, tandis que la monnaie nationale, le rial, s'est fortement dépréciée face au dollar, faisant perdre du pouvoir d'achat.

Quant au programme nucléaire iranien, depuis 2018 les stock d’uranium enrichi n’ont fait qu’augmenter, malgré d'informelles discussions sous Joe Biden entre émissaires américains et négociateurs iraniens. Et si l'Iran n’est pas encore doté de l’arme nucléaire, il est "plus proche que jamais de cette perspective", selon de nombreux experts. Et ce d’autant que l'accord sur le nucléaire arrive à échéance en juillet 2025, ce qui signifie que certaines interdictions à l'égard de Téhéran vont prendre fin. 

Durant la campagne présidentielle, des responsables américains ont aussi accusé l'Iran d'ingérences supposées dans les élections. Donald Trump a pour sa part accusé Téhéran de faire peser de "graves menaces" sur sa vie, après une tentative d'assassinat en juillet. L'Iran avait qualifié de "malveillantes" ces accusations.

Le premier mandat de Donald Trump a également été marqué par sa décision, en janvier 2020, de faire abattre en Irak le puissant général iranien Qassem Soleimani, architecte de la stratégie d'influence régionale de l'Iran. Washington et Téhéran avaient paru au bord de l'affrontement militaire direct. Et la République islamique a lancé une procédure judiciaire en Iran à l'encontre de Donald Trump pour cet assassinat.

"Une personnalité imprévisible"

Côté iranien pourtant, les réactions à la victoire de Donald Trump ont été très modérées. Le résultat de cette élection "ne change rien" pour l'Iran, a commenté le président iranien, Massoud Pezeshkian. Une position répétée à l'envi par les responsables iraniens.

L'ayatollah Ali Khamenei, au pouvoir en Iran depuis 1989 et qui a le dernier mot sur toutes les décisions stratégiques, a connu six présidents américains en exercice. Le guide suprême ne se soucie guère des déclarations de campagne et préfère "attendre de voir quelles actions concrètes la nouvelle administration prendra" à l'encontre de l'Iran, explique l'historien John Ghazvinian interrogé par l’AFP. "L'Iran adopte traditionnellement une approche attentiste après l'élection d'un nouveau président américain", précise cet auteur d'un livre sur les relations entre les États-Unis et l'Iran depuis 1720.

Mais si les officiels iraniens ont montré un visage plutôt rassurant, le marché lui n’a pas menti. Signe de l’inquiétude des Iraniens, à Téhéran la monnaie a dégringolé mercredi, tombant à son plus bas niveau historique. Le rial s'est échangé à 703 000 rials pour un dollar mercredi, selon AP.

Une inquiétude justifiée au vu du risque de conflit ouvert avec Israël avec un Donald Trump aux commandes. "Il reste une personnalité imprévisible", tempère toutefois David Rigoulet-Roze, qui estime sa ligne politique étrangère encore difficile à saisir. "Donald Trump a affirmé plusieurs fois qu’il souhaitait arrêter toutes les guerres, dont celle en Ukraine. Or là, il se met en situation où il pourrait être amené à engager les États-Unis dans une guerre d'envergure par solidarité avec Israël. C'est le paradoxe du personnage et de la situation."

Des déclarations contradictoires sur Gaza

Une diplomatie de l’imprévisible que le 47e président des États-Unis pourrait aussi appliquer à Gaza et au Liban. À ce propos, ses déclarations ont pu se contredire ces derniers mois, entre le rappel de son soutien indéfectible à Israël et son désir de voir la guerre prendre fin.

Durant sa campagne, il a même expliqué qu'un accord devait être trouvé entre les belligérants pour permettre un apaisement régional et ne pas nuire à la réputation de l’État hébreux. Ce qui fait dire à Yossi Mekelberg, spécialiste de géopolitique israélienne qu'"il est parfois préférable de traiter avec des personnes prévisibles, même si on ne les aime pas vraiment, plutôt qu'avec des personnes imprévisibles".

Et le chercheur de rappeler les quelques accrochages entre Donald Trump et Benjamin Netanyahu, en particulier en 2020 lorsque le républicain, qui contestait la victoire de Joe Biden, avait vécu comme une trahison le fait que le Premier ministre israélien félicite le démocrate.

Lors de son précédent mandat, Donald Trump avait pourtant multiplié les gestes en faveur d'Israël, déplaçant l'ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, reconnaissant la souveraineté israélienne sur le plateau du Golan syrien occupé et contribuant à la normalisation des liens entre Israël et plusieurs pays arabes avec les accords d'Abraham. "Personne n'a fait pour Israël ce que j'ai fait pour Israël", s'était félicité le candidat en mars dans une interview accordée au journal Israel Hayom.

Pour la plupart des experts, le retour de Donald Trump va dans le sens des intérêts d'Israël. Dans une vaste interview accordée au magazine Time en avril, le magnat républicain avait nettement marqué sa différence avec l’administration Biden, mettant en doute l'idée qu'une solution à deux États soit encore viable.

Il a par ailleurs promis des mesures fortes contre les manifestations pro-palestiniennes aux États-Unis, dont l'expulsion des étudiants étrangers qui y participeraient. Donald Trump souhaite également ré-interdire, comme en 2017, l'immigration en provenance des pays à majorité musulmane, et l'étendre aux personnes fuyant la guerre à Gaza. "Je vais interdire la réinstallation de réfugiés en provenance de zones infestées par le terrorisme, comme la bande de Gaza, et nous allons sceller notre frontière et rétablir l'interdiction de voyager", a-t-il promis en septembre.

Le nouveau locataire de la Maison Blanche, qui prendra ses quartiers le 20 janvier, devrait lancer dès les prochaines semaines le processus de nomination des membres de son exécutif. Reste à savoir qui sera appelé à la Défense et au secrétariat d’État. Des nominations qui permettront d’en savoir plus sur ses intentions au Moyen-Orient.

*Source : France 24 (avec AFP et AP)

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