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France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique. Traduction d'articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne.


L’attaque contre l’Iran, une guerre pour l’avenir du Moyen-Orient & de la Palestine

Publié par Gilles Munier sur 26 Juin 2025, 07:12am

Catégories : #Iran, #Palestine, #Trump, #Netanyahou, #Khamenei

Par Jeremy Salt & The Palestine Chronicle avec Ramzy Baroud (24 juin 2025)*

L'attaque contre l'Iran n'avait pas pour objectif l'arme nucléaire, mais plutôt la destruction d'un État qui fait obstacle à la pleine hégémonie régionale d'Israël.

Après avoir dominé pendant des siècles le monde musulman et arabe au moyen de guerres, d'invasions, d'occupations et de subversion, “l'Occident” touche au summum de sa violence effrénée, insensée et raciste. N'oublions pas, bien sûr, que la guerre contre les pays musulmans n'est qu'un aspect de la guerre que l'“Occident” impérialiste mène depuis un demi-millénaire contre le reste du monde.

L'issue de la guerre contre l'Iran va redéfinir l'échiquier mondial pour le siècle à venir. Soit l'Iran résiste, soit le Moyen-Orient sera soumis au joug “occidental” pour le siècle à venir.

L'Iran défend plus que son propre pays. Il défend la Palestine, les espoirs et les aspirations des Arabes et des musulmans du monde entier à décider de leur propre avenirsans qu'on le leur dérobe sans cesse. Par extension, il défend les mêmes espoirs et aspirations que le Sud tout entier.

La conquête du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord a commencé avec l'invasion napoléonienne de l'Égypte en 1798. Elle a échoué quelques années plus tard, mais a déclenché une course à la domination qui a progressivement embrasé toute la région. Le discours invoquait la “civilisation”, les outils utilisés étaient les armes les plus sophistiquées de l'époque, réservées aux Européens.

D'où les balles à noyau de datte enrobées de plomb tirées par les Algériens sur les Français dans les années 1830, d'où les lances et les fusils des guerriers soudanais face aux mitrailleuses Maxim alignées par les Britanniques à Omdurman en 1898, les “avions furtifs” et les “bombes intelligentes” utilisés dans la guerre contre l'Irak en 2003, les drones armés qui tuent des femmes et des enfants au Yémen et en Palestine, les bombes “anti-bunker” larguées sur l'Iran, et enfin les armes nucléaires, prêtes à être utilisées si tout le reste échoue.

Cela n'a rien de la prétendue supériorité morale d'une civilisation, mais de la supériorité produite par la technologie générée par la richesse dans une société industrielle moderne. Elle ne l'emporte pas toujours, et peut faillir lorsque survient l'imprévu, comme lorsque le Japon a vaincu la Russie dans la guerre de 1904-1905. Le triomphe militaire d'une puissance “asiatique” a choqué “l'Occident”, mais a prouvé que les Européens peuvent être battus à leur propre jeu, et a donné de l'espoir aux opprimés du monde entier.

Au XIXe siècle, lors du “grand jeu” entre la Russie et la Grande-Bretagne, l'Iran s'est retrouvé à la croisée des chemins entre l'Inde britannique et l'Asie centrale dominée par la Russie. Les tentatives des Iraniens pour se libérer de la menace de ces deux puissances et du règne corrompu des shahs Qajar ont commencé à la fin du XIXe siècle.

La “révolte du tabac” de 1890, où les Iraniens ont refusé de fumer du tabac jusqu'à ce que le shah retire le contrôle total donné à un ressortissant britannique sur la culture, la récolte et la vente du tabac, a été une date clé. Couronnée de succès, cette révolte a été suivie par l'émergence d'un mouvement constitutionnel soutenu par toutes les couches de la société iranienne, dans lequel les femmes ont joué un rôle prépondérant, voire radical.

En 1906, des manifestations de masse ont contraint le shah à proclamer une constitution, puis d'ouvrir un parlement. La lutte entre le peuple et le shah pour l'instauration d'un gouvernement constitutionnel s'est poursuivie jusqu'à ce que le shah fasse appel à des milliers de soldats russes en 1911 et ferme le Majlis. Les turbulences de la Première Guerre mondiale ont pris fin avec la chute des Shahs Qajar et l'installation, soutenue par les Britanniques, du premier Shah Pahlavi.

Ces événements doivent être replacés dans le contexte de l'agression impérialiste contre d'autres pays musulmans de l'époque, alors que leur soif de territoire rapprochait les puissances européennes d'une guerre.

La quasi-totalité de l'Afrique était sous leur contrôle lorsque la “crise d'Agadir” de 1911 a failli déclencher un conflit ouvert entre l'Allemagne et la France. La même année, l'armée italienne a envahi la Libye ottomane et, en 1912, la Grèce, la Bulgarie, la Serbie et le Monténégro ont envahi la Macédoine ottomane, avec le soutien à peine dissimulé de leurs puissants alliés impériaux.

À cette époque, la découverte d'un gisement de pétrole à Masjid al Sulaiman en 1908 a fait de l'Iran un atout “occidental” indispensable, à défendre à tout prix, quel qu'en soit le coût pour les autres. Le pétrole, et non plus le charbon, est alors devenu la source d'énergie de la puissance militaire et industrielle “occidentale”. Les pays disposant de cette ressource n’allaient plus être autorisés à devenir indépendants.

En 1911, l'Américain W. Morgan Shuster, étranger au pays, a été nommé trésorier général de l'Iran. Chargé de réorganiser les finances iraniennes, il s'est retrouvé confronté aux intrigues britanniques et russes.

Il a décrit sa réaction dans son livre ‘The Strangling of Persia’ (1912), où il explique à quel point il était compliqué de

“décrire correctement les scènes en constante évolution qui ont accompagné la chute de cette ancienne nation, des scènes où deux pays chrétiens puissants et soi-disant éclairés ont fait fi de la vérité, de l'honneur, de la décence et de la loi”.

Les mêmes phrases pourraient décrire les guerres illégales et contraires à toute morale que “l'Occident” a menées contre les pays musulmans depuis les attentats du 11 septembre.

Le livre de Shuster préfigure l'intention de Trump d'assassiner l'ayatollah Khamenei. En 1911, le gouverneur militaire russe occupant Tabriz fit pendre le plus haut dignitaire religieux de la ville. Comme l'a écrit Shuster, citant un journaliste britannique,

“l'effet de cet outrage sur les Perses fut le même que celui que produirait sur les Anglais la pendaison de l'archevêque de Canterbury un vendredi saint”.

En 1951, un gouvernement nationaliste dirigé par Muhammad Mossadegh a nationalisé le pétrole, alors entre les mains de l'Anglo-Persian Oil Company. En 1953, il fut renversé lors d'une opération conjointe de la CIA et du MI6. Fuyant le pays peu avant, le Shah Reza Pahlavi fut rétabli dans ses fonctions, cette fois déterminé à gouverner et non plus seulement à régner, ce qu'il fit en grande partie grâce à sa tristement célèbre police secrète, la SAVAK, et à son réseau de services du renseignement.

Son heure a finalement sonné en 1979, lorsqu'il a fui le pays avant le retour d'exil de l'ayatollah Ruhullah Khomeini, que le régime avait chassé et qui a contribué à orchestrer le renversement du régime depuis la France.

Ce fut la révolution islamique iranienne. L'une des premières mesures du nouveau gouvernement a été de céder l'ambassade israélienne à l'OLP, ce qui nous amène au cœur de l'attaque actuelle contre l'Iran : la Palestine.

Si l'Iran avait renoncé à la question palestinienne, il aurait pu faire la paix avec les États-Unis à tout moment. C'est tout ce qu'il avait à faire. En fait, depuis l'époque du président Rafsandjani, l'Iran a clairement indiqué être prêt à œuvrer avec les États-Unis, et permettre aux entreprises américaines de s'implanter en Iran à des conditions favorables. Le président Khatami a tendu le même rameau d'olivier pendant son mandat, mais les sanctions ont été renforcées.

Le problème a toujours été la Palestine. L'Iran a respecté à la lettre le droit international, et n'a pas cédé malgré toutes les menaces et provocations. De plus, Israël a continué à mener des attaques militaires brutales contre la population civile palestinienne et contre pratiquement tous les pays riverains de la Palestine.

À elle seule, l'attaque contre le Liban en 1982 a coûté la vie à 20 000 personnes et a été le signe avant-coureur de bien pire, comme l'ont montré les attaques contre Gaza jusqu'au 7 octobre 2023, puis contre Beyrouth et le sud du Liban l'année suivante.

Malgré tout, l'Iran n'a jamais dérogé à sa position de principe et à son rôle de pilier de “l'axe de la résistance”. Les États-Unis ont tenté de le détruire lors de la guerre Iran-Irak de 1980-1989, mais ont échoué. Il a subi de terribles pertes, mais s'est rapidement relevé et est devenu l'une des figures de proue des pays des BRICS, l'équivalent contemporain du mouvement des non-alignés des années 1950.

Frustré, Israël a tenté de le démanteler à la moindre occasion, assassinant ses scientifiques en Iran, ses commandants militaires en Syrie et tentant de semer le chaos à coups de sabotage électronique.

Netanyahu en était obsédé, mais n'a pas réussi à persuader les États-Unis de lancer une attaque conjointe. La deuxième meilleure option était la guerre par procuration contre la Syrie (2011-2024), une tentative de l'“Occident” et d'Israël de détruire la colonne vertébrale de l'alliance stratégique entre l'Iran, la Syrie et le Hezbollah.

Elle a abouti en décembre 2024, lorsque le gouvernement syrien s'est effondré et qu'un président fantoche s'est installé au pouvoir. À ce moment-là, en septembre, Israël avait tué ou mutilé des centaines de civils libanais dans ses attaques aux beepers et avait assassiné des personnalités clés de la chaîne de commandement militaire et politique du Hezbollah. Il s'était auparavant livré à l'assassinat du président du Hamas, Ismail Haniyeh, alors qu'il se trouvait à Téhéran pour l'investiture du président Raisi, lui-même bientôt victime d'un “accident” d'hélicoptère portant la signature d'un assassinat du Mossad.

Du point de vue d'Israël, ces années ont été très fructueuses : génocide à Gaza sans qu'aucun pays ne s'y oppose, renversement du gouvernement syrien et paralysie du Hezbollah.

L'accord Sykes-Picot a livré le Moyen-Orient à l'Occident pendant un siècle, et si l'Iran pouvait être démembré aujourd'hui, l'Occident serait “en sécurité” pour le siècle à venir. Le grand bénéficiaire serait Israël, libre de s'étendre jusqu'à ses frontières bibliques, aux dépens du Liban, de la Syrie, de la Jordanie, de l'Irak, de l'Arabie saoudite, et peut-être même de la Turquie.

Trump semble hésiter à rejoindre Israël pour une attaque massive contre l'Iran, mais c'est peut-être juste un coup de propagande. Les plans ont déjà été élaborés, mais s'il hésite, c'est parce que son administration, le Congrès, le peuple américain et même son propre mouvement MAGA ne le soutiennent pas. De plus, les Américains en ont assez des guerres au Moyen-Orient et n’en veulent pas de nouvelle, surtout au nom d'un État largement reconnu aux États-Unis comme étant génocidaire.

Malgré tout, Trump semble prêt à aller de l'avant. Il préfère les mensonges de Netanyahu aux conclusions de ses propres services du renseignement, résumées par Tulsi Gabbard, selon lesquelles l'Iran ne développe pas d'arme nucléaire. Mais l'attaque contre l'Iran n'a de toute façon rien à voir avec l'arme nucléaire, elle vise plutôt la destruction d'un État qui fait obstacle à l'hégémonie régionale totale d'Israël.

C'est le grand moment historique de Netanyahu, celui qu'il prépare depuis des décennies, et il n'est pas près de le laisser passer. Il est déjà inculpé pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité, mais les générations futures auront tout le temps de se demander pourquoi un criminel aussi dépravé n'a pas été arrêté avant de mener le monde au bord du gouffre. L'avenir nous le dira.

*Source : The Palestine Chronicle

Traduit par Spirit of Free Speech

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