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Houari Boumediene... Amadou Ampate Ba... Et, notre passé colonial...
On conteste notre passé, et notamment notre passé colonial, parce que nous sommes paralysés au point de ne plus savoir s’y référer par nous-mêmes.
Il suffirait pourtant de tenir son journal. Ainsi ai-je noté le 7 mars 1969 : « le président algérien, Houari Boumediene, nous reçoit à Alger, mon ami Pierre Rossi et moi, et nous dit qu’à ses yeux la France fait partie de l’histoire de l’Algérie. Boumediene insiste : ‘‘ La coopération avec la France n’est pas une phase tactique dans notre développement, mais une option à long terme de l’Algérie. Cette coopération est une question de confiance. Il faut que les Français sachent que l’intérêt de la France va dans le même sens que l’intérêt de l’Algérie, que la France a besoin de l’Algérie comme l’Algérie a besoin de la France.’’ Mais il ne se perd pas à calculer les équivalences du positif et du négatif. L’homme est austère, mais détendu et souriant. Il veut que le monde arabe renoue avec son histoire et sa civilisation, mais il est pour l’arabisme des patries. » Pourquoi les successeurs de Boumediene ont-ils choisi de n’avoir pas de mémoire, comme si cela pouvait changer l’histoire ?
De même, découverte émouvante d’Amadou Ampate Ba, conteur ivoirien exceptionnel, au dîner offert en son honneur, en décembre 1974, par mon ami Jacques Raphaël-Leygue, à l’ambassade de France à Abidjan. J’ai noté scrupuleusement ce qu’Ampate Ba tint à nous confier : « Les Africains qui parlent le plus de colonialisme sont ceux qui ne l’ont pas connu. Moi, j’ai vu arriver le premier administrateur colonial et j’ai vu partir le dernier. Les jeunes cassent tout, mais les vieux disent merci. Le retour aux sources… si j’écrivais en peulh, qui me lirait ? Je suis reconnaissant à la France de m’avoir fait accéder à l’universalité. » Bien sûr, il n’avait pas besoin d’opérer un retour aux sources, puisqu’il ne les avait jamais quittées.
Il me semble que ce que je viens d’évoquer date d’hier. Mais pour certains, le plus proche passé n’existe pas. Par manque d’éducation sans doute.
P.S.R.
*Philippe de Saint Robert est écrivain, ancien Commissaire général à la langue française (1984-1987)
Philippe de Saint Robert, sur France-Irak Actualité : ICI