L’« immunité » évoquée par la Paris serait une demande de Benjamin Netanyahu en échange de la signature de l’accord de cessez-le-feu, affirment les quotidiens israéliens « Haaretz » et « Maariv ».
Par Le HuffPost (revue de presse : 27 novembre 2024)*
INTERNATIONAL - Petit arrangement entre amis. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu aurait accepté de signer le cessez-le-feu avec le Hezbollah, marquant l’arrêt temporaire des hostilités au Liban, en échange d’une faveur : que Paris n’applique pas le mandat d’arrêt émis par la CPI une semaine plus tôt. Cette révélation a été faite par deux des plus grands quotidiens israéliens ce mercredi 27 novembre, Haaretz et Maariv.
Jeudi dernier, la Cour pénale internationale (CPI) a émis un mandat d’arrêt pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité contre Benjamin Netanyahu et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant, en raison des opérations menées dans la bande de Gaza. Cette annonce est intervenue alors que les États-Unis et la France s’activaient en coulisses pour faire signer l’accord de cessez-le-feu au Liban.
Une fois la décision de la CPI rendue publique, la France a dit vouloir appliquer ses obligations au titre du droit international, sans toutefois préciser si elle arrêterait Benjamin Netanyahu dans le cas ou il venait à poser le pied sur le sol français. À l’inverse du Royaume-Uni ou l’Italie par exemple, qui ont été beaucoup plus clairs dans leurs intentions.
La position française a provoqué la colère de Benjamin Netanyahu, qui a menacé d’exclure Paris des négociations, rapporte Maariv. Problème, le Liban voulait absolument la présence de la France, proche alliée, dans ces discussions. Benjamin Netanyahu aurait alors posé son « exigence », explique Haaretz, et réclamé à la diplomatie française d’invoquer « l’immunité » dont il bénéficierait selon les Statuts de la CPI.
Une « immunité » qui fait débat
Signé en 1998, le traité instituant la CPI aborde la question de l’immunité de dirigeants de pays ne reconnaissant pas la cour dans son article 98. Ce dernier introduit en effet une exception concernant l’arrestation et la remise de responsables d’États non-membres de la CPI, comme c’est le cas d’Israël, et ouvre la voie aux interprétations.
Pour ne pas faire capoter les négociations, Paris aurait donc accepté de lâcher du lest sur l’application du mandat d’arrêt. C’est pourquoi le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a évoqué ce mercredi de possibles « questions d’immunité » pour « certains dirigeants » visés par des mandats d’arrêts de la CPI. Plus tard, le quai d’Orsay a précisé que le Premier ministre israélien bénéficiait de cette « immunité » qui « devra être prise en considération si la CPI devait nous demander leur arrestation et remise ».
Sauf que cette nouvelle interprétation française a suscité un vent de réprobation à gauche mais aussi de la part d’associations ou ONG. Amnesty International insiste par exemple sur « les obligations fondamentales de la France en tant qu’État partie à la CPI », tandis que pour la directrice France de Human Rights Watch (HRW), Bénédicte Jeannerod, la position française est « profondément choquante ».
D’autres points d’achoppement
La question du mandat d’arrêt de la CPI et de son application n’était cependant pas le seul point d’achoppement dans ces négociations. D’après le site américain Axios, l’autorisation pour Israël de répondre par la force en cas de violation de l’accord par le Hezbollah était débattue. Sur conseil de la France, le Liban a jugé cette « liberté d’action » était inacceptable, mais elle a finalement été adoptée.
Toujours d’après Axios, ce changement de pied aurait lieu après une rencontre au G20 entre Emmanuel Macron et le secrétaire d’État américain Antony Blinken à Rio le 19 novembre. Conscient que cette position pouvait mettre fin aux négociations, le chef de l’État français fait une concession. Interrogée par Axios, une source française a néanmoins démenti.
Mais les États-Unis ont aussi mis la pression sur Israël, raconte Haaretz dans un autre article. D’après le journal d’opposition honni par le gouvernement, qui cite le cabinet du Premier ministre Benjamin Netanyahu, l’administration Biden aurait menacé de mettre un embargo sur les armes si Israël ne signait pas cet accord.