Par Abdou Semmar (revue de presse : Algérie Part – 10 mars 2024)*
Le 29 février dernier, Joe Biden a proposé de nommer Joshua Harris, actuel secrétaire d’État adjoint pour l’Afrique du Nord, ambassadeur des États-Unis en Algérie. Ce dernier devrait donc remplacer l’ambassadrice Elizabeth Moore Aubin, en poste à Alger depuis le 9 février 2022, après la validation de cette proposition par la commission des affaires étrangères du Sénat américain. Cette nouvelle ne passe pas inaperçue vu le rôle très important que joue Joshua Harris depuis plusieurs mois dans la région du Maghreb dont il est chargé, notamment dans le dossier du Sahara Occidental et des mauvaises relations entre l’Algérie et le Maroc.
C’est dans ce sens qu’il s’était rendu à deux reprises dans la région (Rabat, Alger, et les camps des réfugiés à Tindouf), à savoir en septembre et décembre 2023. Joshua Harris a été même porteur d’une médiation américaine qui tentait d’imposer des négociations pour la conclusion d’un accord de paix entre l’Algérie et le Maroc. En décembre 2023, Joshua Harris a même proposé un deal complet à Alger pour l’amener à rétablir ses relations diplomatiques avec Rabat en offrant des gages et des engagements concrets qui garantiront la sécurité nationale de l’Algérie.
Joshua Harris a même exercé de fortes pressions sur les dirigeants algériens pour leur arracher un engagement solennel de ne jamais lancer une offensive militaire contre le Maroc et en contrepartie, Washington a fourni des gages qui assurent à l’Algérie une protection contre toute agression marocaine appuyée par Israël, l’allié militaire du Maroc depuis novembre 2021, avec à la clé des promesses de vendre des armes américaines sophistiquées à l’Armée Algérienne. Les pressions exercées par Joshua Harris sur le régime algérien ont abouti à un calme, précaire certes, mais un calme garanti sur le font militaire entre l’Algérie et le Maroc puisque le régime algérien n’a plus organisé de grands exercices militaires menaçants aux frontières du Maroc depuis mai 2023.
Considéré comme un véritable « dur à cuire », Joshua Harris est aussi l’un des meilleurs connaisseurs des enjeux et dossiers délicats du Monde arabe et du Maghreb. Sous-secrétaire d’Etat adjoint en charge de l’Afrique du Nord depuis juillet 2022, M. Harris a eu à coordonner l’élaboration et la mise en œuvre des politiques américaines envers la région du Grand Maghreb. De 2019 à 2021, il a été chef de mission adjoint, fréquemment chargé d’affaires à l’ambassade des Etats-Unis à Tripoli, et au bureau extérieur de la Libye à Tunis. Auparavant, M. Harris a été sous-secrétaire d’Etat adjoint par intérim et directeur en charge des affaires maghrébines au département d’Etat. Il a été également en poste à Ljubljana en Slovénie, à Baghdad en Irak, et à Zagreb en Croatie. Diplômé de la Edmund A. Walsh School of Foreign Service de l’université de Georgetown et de la London School of Economics and Political Science, Joshua Harris parle arabe, croate, français, italien, polonais et slovène.
Il a déjà travaillé avec Brett McGurk, conseiller à la Maison-Blanche et coordinateur pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord au Conseil de sécurité nationale. Il était son directeur politique quand M. McGurk était envoyé spécial de la Maison-Blanche auprès de la coalition internationale contre l’organisation terroriste Etat islamique en Irak et en Syrie (EIIS), créée en 2015. Le choix de M. Harris, qui jouit d’une grande maîtrise des dossiers régionaux, comme celui du Sahara occidental, pour succéder à Elizabeth Moore Aubin, en poste à Alger depuis février 2021, est loin d’être anodin. Et il démontre que Washington veut maintenant passer à la vitesse supérieure en Algérie en suivant de très près l’organisation des prochaines élections présidentielles algériennes prévues en décembre 2024. Joshua Harris aura certainement la mission d’empêcher les dirigeants algériens d’entraîner toute la région du Maghreb dans une spirale de crises politiques et sécuritaires en provoquant une crise d’instabilité majeure dans leur pays d’ici décembre 2024.
*Source : Algérie Part
Les dessous et enjeux importants de cette nouvelle nomination dans le podcast vidéo d’Abdou Semmar : ICI