Par Robert Bibeau (revue de presse : Les 7 du Québec -29/7/18)*
Donald Trump n’a pas déchiré l’accord sur le nucléaire iranien par inadvertance. Cette répudiation mûrement réfléchie – annoncée en 2016 pendant sa campagne à la présidence – démontre bien l’ineptie des pseudos analystes politiques – taxant ce polichinelle de l’establishment et de l’État profond – d’imprévisible et de girouette ingouvernable – ridicule épithète qui ne convient pas à ce grand capitaliste de l’immobilier étasunien. Comme le dompteur de lion Trump n’est pas parvenu à reconstituer l’armada occidentale pour semer la guerre, le chaos et l’insécurité des approvisionnements en provenance du Golfe persique, le petit maréchal de l’OTAN doit se rabattre sur ses affidés arabes faisant face à l’Iran de l’autre côté du Détroit d’Ormuz stratégique. Non pas pour bloquer ce détroit vital pour l’Europe mais pour menacer de le bloquer. Il y a peu à dire à propos de cette nouvelle tentative agressive américaine dans cette partie du monde, sinon qu’elle vise à maintenir l’insécurité des approvisionnements en hydrocarbures et ainsi maintenir élevé le prix du carburant assurant la rentabilité de l’exploitation et de la commercialisation du pétrole et du gaz de schiste américain et ainsi à maintenir l’hégémonie des pétrodollars sur les marchés mondiaux. L’Iran a bon dos quand il s’agit de mettre au pas les « alliés et concurrents » commerciaux occidentaux comme vous le lirez dans les articles qui suivent qui expliquent en détail la manœuvre commerciale étatsunienne .
UNE OTAN ANTI-IRAN – OU UNE OTAN ANTI-EUROPÉENNE?
Alors que le dernier sommet de l’OTAN a sonné, selon de nombreux analystes, le glas de l« Alliance militaire euro-américaine à vocation anti-russe », l’administration Trump repart en guerre contre l’Iran avec l’idée à mainte reprise exploitée mais jamais réalisée d’une OTAN anti-Iran. Cette alliance dite « sécuritaire et politique » au Moyen-Orient devra inclure les six pays arabes du Conseil de coopération du golfe Persique (CCGP) qui n’est plus que l’ombre de lui-même plus l’Égypte et la Jordanie. Les analyses occidentales sur la vocation de cette OTAN convergent tous : il s’agit de contrer l’Iran mais les experts occidentaux qui tentent souvent à cacher les vrais enjeux de ce genre de projets restent atones sur les chances réelles d’une OTAN arabe à voir un jour le jour.
Pour l’éditorialiste de Raï al-Youm, Abdel Bari Atwan, l’objectif de cet organisme consiste surtout à faire chanter les pays arabes vu que Trump a échoué à soustraire de l’argent à ses alliés non-arabes. L’OTAN arabe, ainsi que le dit la Maison Blanche devra renforcer les coopérations US avec les pays arabes en matière de « défense balistique », d’ »exercices militaires », de « lutte contre le terrorisme », à quoi devraient s’ajouter des coopérations économiques et diplomatiques. Un sommet devant se tenir les 12 et 13 octobre à Washington devra consacrer cette alliance qui serait nommé « l’alliance stratégique du Moyen-Orient ».
Mais quels sont les chances de succès de ce projet?
Pour les analystes qui suivent le cours des relations USA/monarchies arabes, l’idée est loin d’être prometteuse : d’abord en raison des divergences qui déchirent le Conseil de Coopération et qui ont poussé Riyad et Abou Dhabi de s’en dissocier et de créer un tandem lequel peine, lui aussi, à s’imposer au Yémen. Trump aura une lourde tâche puisque le prince héritier saoudien qui devra être le vecteur de l’OTAN arabe s’est mis déjà sur le dos Manama, Le Caire, voire Abou Dhabi. il faudrait donc à M. Trump d’offrir sa médiation. Une fois cette médiation aura été faite, le président US devrait penser à réconcilier ces 5 pays avec le Qatar et là, la tâche risque d’être beaucoup plus difficile. Surtout qu’une réconciliation pourrait s’avérer coûteuse pour l’Amérique : la crise saoudo-qatarie a poussé Doha à signer de gros contrats avec les Américains dont l’un d’un montant de 12 milliards de dollars. Si tout le monde se réconciliait, comment surfer alors sur la peur d’autrui et s’en servir pour remplir les caisses d’État US? Et puis à qui accorder la direction de cette OTAN arabe? À l’Égypte ou à l’Arabie saoudite? Une chose est sûre : il serait difficile pour la Maison Blanche de réconcilier les deux éternels frères ennemis qui se disputent le leadership du monde arabe.
De nombreux analystes relèvent des arrière-pensées qui animent cet organisme qui pourrait ne pas être uniquement « iranophobe ». La Turquie se montre en effet de plus en plus récalcitrante vis-à-vis des Américains et des alliés arabes de ces derniers et l’OTAN arabe pourrait un jour retourner contre Ankara.
La décision américaine de forger une alliance arabe sur le modèle de l’OTAN semble avoir été prise après l’échec du gouvernement Trump à isoler l’Iran sur la scène internationale dans la foulée de son retrait de l’accord nucléaire de 2015. Mais rien n’assure pour l’heure M. Trump du succès de son nouvelle entreprise qui semble bien hasardeuse.