Nouri al-Maliki
Revue de presse : Middle East Monitor (23/2/18)*
Un « haut » responsable du gouvernement irakien, voulant garder l’anonymat, a confié au site The New Arab que « l’enquête sur la chute de Mossoul était gelée », qu’elle ne reprendrait pas sous le nouveau gouvernement, non par manque de preuves, mais parce qu’elle désignait comme responsables l’ancien Premier ministre, Nouri al Maliki, son chef d’état-major Tariq Najm, Saadoun al- Dulaimi, ancien ministre de la Défense, Adnan al- Assadi, ancien sous-secrétaire au ministère de l’intérieur , ainsi que de haut gradés du commandement militaire, des officiels de la Police Fédérale et des personnalités locales ».
Jusqu’à présent, cette enquête de huit mois a entendu 100 témoins (politiciens et militaires).
Il a souligné que « l’enquête et les déclarations des chefs militaires ainsi que l’écoute des conversations téléphoniques entre la direction militaire à Mossoul, avant la chute de cette dernière, et le Cabinet de Maliki, révélaient l’existence de ce qui paraît être un plan. Toutes les informations sur les mouvements et l’avance de Daesh aboutissaient chez le Premier ministre sans qu’un ordre ait été donné ». Les recherches montrent que Maliki voulait mettre à profit la chute et la reprise de Mossoul pour promouvoir sa campagne, ce qui a échoué avec l’effondrement des forces irakiennes. Avec le flot de militants de l’organisation terroriste en provenance de la Syrie, le gouvernement et les forces armées ont totalement perdu le contrôle.
Fin 2014, le Parlement irakien, à la demande de 89 parlementaires, a voté la constitution d’un comité pour éclairer les raisons de la chute de la ville. Fin août 2015, il recommandait la comparution de 70 policiers et officiels de la sécurité dont Al-Maliki, les tenant pour responsables de la débandade des forces armées et la prise de contrôle de la ville par Daesh.
Le rapport confirmait qu’al-Maliki et le gouverneur de la province de Ninive, Atheel al-Nujaifi, en étaient à l’origine. Selon un membre du conseil de la province, Hussein al-Abar, « les compromissions et les intérêts partisans et les dissensions ont retardé les résultats sur cette affaire, jusqu’à présent ». « Le gouvernement de de la province de Ninive avait exigé, plus d’une fois, au cours de réunions avec al-Abadi, et Salim al-Jubouri, Président du parlement d’exercer des pressions sur l’appareil judiciaire pour inculper les auteurs. « Le retard dans l’annonce des conclusions de l’enquête attestent de l’existence de formidables pressions politiques ».
En juin 2017, le député Abdul Rahman Alloizi révélait l’influence de « personnes plus importantes que la loi. » impliquées dans la catastrophe, notant « que l’absence de volonté politique pour tenir pour responsables les parties concernées, notamment les personnalités proéminentes en charge, de tous types ou factions, a imposé le silence à tous peu enclins à favoriser la justice ».
Un membre de la coalition de la loi d’Etat dirigée par Al-Maliki, Iskander Watut, a expliqué à The New Arab que « les auteurs du rapport ont négligé le nom de personnalités politiques et militaires dont celui du Chef d’Etat-Major, Babaker Zebari, qui dit avoir ordonné le retrait des forces armées ainsi que de ne pas avoir passé assez d’accusations sur cet incident au président du Kurdistan irakien, Massoud Barzani ».
Il a ajouté « Je ne prends pas la défense d’Al-Maliki, mais le tenir pour seul responsable est totalement illogique. Ce n’était pas sa faute, mais plutôt celle de son conseiller militaire, Farouk al-Araji, qui ne l’a pas informé du danger de cette percée. » « Le dossier est à présent entre les mains du judiciaire, et nous lui faisons confiance, mais les développements du comité, nommé par le Parlement, sont totalement biaisés ».
A un moment où les députés et les personnalités politiques pensent que le document d’enquête est devant le Conseil Suprême Judiciaire, -l’autorité administrative suprême chargée des affaires judiciaires irakiennes, - une source du Conseil confirme que « le document a été soumis par le comité pour être contrôlé, comme l’occupation de territoires irakiens, où se trouvaient de nombreux membres de la sécurité, et le retrait de l’armée de la région de Mossoul, sont des crimes de guerre ».
« La chute de Mossoul est un crime militaire et le procès doit être conduit par les tribunaux militaires » « un procès judiciaire ordinaire n’a rien à voir dans ce cas » ajoute la personnalité anonyme.
*Source (version originale) : Baghdad freezes investigation process of the fall of Mosul
Traduction et Synthèse: Xavière Jardez
Rappel, sur le même sujet:
A Mossoul, les forces irakiennes avaient reçu l’ordre de ne pas se battre - 3 questions à... Gilles Munier - Propos recueillis par Lina Kennouche (L’Orient-Le Jour – 17/8/15)
Iraq probe implicates Maliki over Mosul's fall to ISIL (Al Jazeera - août 2015)