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France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique. Traduction d'articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne.


L’allégation nucléaire clé à l’origine de la guerre vient d’un algorithme de contre-espionnage de Palantir

Publié par Gilles Munier sur 24 Juin 2025, 09:29am

Catégories : #Iran, #Trump, #Netanyahou

Par Alastair Crooke (revue de presse : Strategic Culture - 23 juin 2025)*

Trump s'est rangé du côté des Israéliens, affirmant que l'Iran est “très proche” de posséder la bombe, et a ajouté qu'il se fiche de ce que pense Gabbard.

La résolution du Conseil de l'AIEA du 12 juin 2025 sur le “non-respect” des obligations de l'Iran aurait été l'élément déclencheur planifié de l'attaque surprise d'Israël contre l'Iran le lendemain. Les Israéliens affirment que le plan de guerre contre l'Iran était fondé sur “l'opportunité” de frapper, et non sur des informations des services du renseignement selon lesquelles l'Iran se rapprochait à grands pas de la bombe (le prétexte de la guerre).Alastair Crooke

L'affirmation soudaine selon laquelle l'Iran serait très proche de la bombe (qui semble avoir surgi de nulle part, laissant les Américains perplexes quant à la façon dont cela a pu se produire - en un clin d'œil, nous partons en guerre - a ensuite été réfutée par le directeur général de l'AIEA, M. Grossi, sur CNN le 17 juin (mais seulement après que l'attaque soudaine contre l'Iran ait déjà eu lieu) :

“Nous n'avons aucune preuve que l'Iran ait pris des mesures systématiques pour se doter de l'arme nucléaire”,

a confirmé M. Grossi sur CNN.

Cette déclaration a suscité la riposte suivante de l'Iran par l'intermédiaire de son porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Esmaeil Baqaei, le 19 juin :

C'est trop tard, M. Grossi – vous avez occulté cette vérité dans votre rapport totalement biaisé qu'ont instrumentalisé l'E3 et les États-Unis pour élaborer une résolution contenant des allégations sans fondement de ‘non-respect’ [par l'Iran]. Cette même résolution a ensuite été utilisée, comme prétexte final, par un régime belliciste génocidaire pour mener une guerre d'agression contre l'Iran et lancer une attaque illégale contre nos installations nucléaires pacifiques. Savez-vous combien d'Iraniens innocents ont été tués ou mutilés à la suite de cette guerre criminelle ? Vous avez transformé l'AIEA en un outil servant les intérêts des pays non signataires du TNP afin de priver les signataires de ce traité de leur droit fondamental en vertu de l'article 4. Avez-vous la conscience tranquille ?!”.

À quoi le Dr Ali Larijani, conseiller du Guide suprême, a ajouté :

“Lorsque la guerre sera terminée, nous demanderons des comptes au directeur de l'AIEA, Rafael Grossi”.

Ce qu'ils disent

Déclaration du ministère russe des Affaires étrangères concernant l'escalade du conflit israélo-iranien –

“Ce sont précisément ces ‘sympathisants’ [l'UE3] qui ont exercé des pressions sur la direction de l'Agence [AIEA] pour qu'elle prépare une ‘évaluation complète’ controversée du programme nucléaire iranien, dont les lacunes ont ensuite été exploitées pour faire adopter une résolution anti-iranienne partiale par le Conseil des gouverneurs de l'AIEA le 12 juin [2025]. Cette résolution a en effet donné le feu vert aux agissements de Jérusalem-Ouest, menant à la tragédie » [c'est-à-dire à l'attaque surprise le lendemain, le 13 juin]”.

Dans les coulisses

Les arguments qui ont servi de base à la résolution de l'AIEA du 12 juin 2025 – donnant à Israël un prétexte pour frapper l'Iran (et conçue pour influencer le président Trump afin qu'il ignore les avertissements de son propre directeur du renseignement national selon lesquels il n'y a aucune preuve que l'Iran s'oriente vers la militarisation) – n'auraient pas été fournis par le Mossad ou d'autres services de renseignement occidentaux, mais par un logiciel de l'AIEA.

Comme le souligne DD Geo-politics, depuis 2015, l'AIEA s'appuie sur la plateforme Mosaic de Palantir, un système d'intelligence artificielle à 50 millions de dollars qui passe au crible des millions de points de données – images satellites, réseaux sociaux, registres du personnel – afin de prédire les menaces nucléaires :

“Les stocks [d'uranium enrichi] de l'Iran ont augmenté régulièrement pendant des mois, mais le discours sur une percée imminente n'a pris de l'ampleur qu'après la condamnation de l'AIEA le 6 juin 2025. Cette résolution, adoptée par 19 voix contre 3, a fourni à Israël le prétexte diplomatique dont il avait besoin. La plateforme Mosaic de Palantir a joué un rôle crucial dans ce revirement. Ses données ont façonné le rapport du 31 mai, signalant des anomalies à Fordow et Lavisan-Shian, et recyclant des allégations antérieures provenant de Turquzabad, malgré les démentis et autres sabotages de l'Iran depuis des années ... Mosaic a été conçu à l'origine pour identifier les activités rebelles en Irak et en Afghanistan”.

Son algorithme cherche à identifier et à déduire les “intentions hostiles” à partir d'indicateurs indirects – métadonnées, modèles comportementaux, trafic de signaux – et non à partir de preuves confirmées. En d'autres termes, il postule ce que les suspects pourraient penser ou planifier. Le 12 juin, l'Iran a divulgué des documents qui, selon lui, montraient que le chef de l'AIEA, Rafael Grossi, partageait les résultats de Mosaic avec Israël. En 2018, Mosaica traité plus de 400 millions de données distinctes et a contribué à éveiller les craintes concernant plus de 60 sites iraniens, justifiant ainsi les inspections inopinées de ces sites par l'AIEA, dans le cadre du JCPOA. Ces résultats, bien que dépendant en grande partie des équations algorithmiques, ont été intégrés dans les rapports officiels de l'AIEA sur les contrôles de sécurité et ont été largement acceptés par les États membres de l'ONU et les régimes de non-prolifération comme des évaluations crédibles et fondées sur des preuves. Mosaic n'est toutefois pas un système passif. Il est conçu pour déduire de son algorithme des intentions hostiles, mais lorsqu'il est réutilisé à des fins de surveillance nucléaire, ses équations risquent de traduire une simple corrélation en intention malveillante.

Ce qu'en disent les principaux médias israéliens

Ben Caspit, commentateur israélien de centre-droit (Ma'ariv) :

La ‘percée’ de l'Iran vers l'arme nucléaire a-t-elle réellement été détectée ? Probablement pas. L'ordre du Guide suprême de se doter d'une arme nucléaire militaire a-t-il réellement été donné ? Probablement pas. Ce qui nous a poussés à entrer en guerre, c'est qu'on n'avait pas le choix. Ils faisaient la promotion d'un plan d'anéantissement d'Israël et nous n'avions pas le choix... Le 7 octobre, une douche froide a réveillé tout un pays. Tous ceux qui sont impliqués doivent comprendre que quiconque envisage notre destruction sera détruit. Les yeux rivés sur la balle, et une balle entre les deux yeux... À partir de maintenant, chaque mouvement de nos ennemis, où qu'ils soient, doit être suivi d'une action. Toute tête de serpent qui se lève doit être décapitée... Et il y a autre chose : la rare et unique fenêtre d'opportunité historique qui s'est soudainement ouverte devant nous... Tout cela a justifié la décision d'entrer en guerre... Netanyahu est actuellement en pleine euphorie”.

Commentateur israélien, Nahum Barnea (Yedioth Ahoronot) :

“La décision de déclencher la guerre revient entièrement à Netanyahu. Et le voilà, décideur et responsable : tout le mérite lui revient. Trump a donné à Israël le feu vert pour déclencher une guerre, à condition qu'il ne présente pas l'Amérique comme un partenaire et un responsable. La méthode Trump ne fait pas de distinction entre l'Ukraine de Zelensky et l'Iran de Khamenei : l'humiliation est le garant d'un accord final”.

Ronan Bergman, commentateur israélien et du NY Times (Yedioth Ahoronot) :

“La nécessité de la série d'assassinats de la semaine dernière a germé pour la première fois en septembre dernier, parmi les hauts responsables de l'Unité 8200, la division de recherche de la Direction du renseignement, du Mossad et d'autres branches du système. Le déclencheur a été la défaite infligée par l'armée israélienne au Hezbollah, suivie de l'attaque réussie contre l'Iran et de la destruction de son système de défense aérienne en octobre, puis de l'effondrement du régime d'Assad à Damas et de la destruction de son système de défense aérienne par l'armée israélienne en décembre. La succession des événements a conduit de nombreux hauts responsables israéliens à croire qu'une occasion sans précédentse présentait, une occasion unique d'attaquer l'Iran... Et c'est ainsi que ‘le forum de décapitation’, qui a décidé du sort de scientifiques à des milliers de kilomètres de là, s'est réuni et a décidé qui serait classé au niveau A – le plus important – et qui serait classé aux niveaux B, C ou D – les moins importants”.

Vue d'ensemble

Apparemment, Trump a été convaincu par Netanyahu, Ron Dermer et le général Kurilla du CENTCOM (Politico rapporte que Kurilla a joué un rôle déterminant pour persuader Trump que la directrice du renseignement national Tulsi Gabbard avait tort dans son évaluation selon laquelle l'Iran ne possède pas la bombe atomique). Trump s'est rangé du côté des Israéliens, affirmant que l'Iran est “très proche” de posséder la bombe, et a ajouté qu'il “se fiche de ce qu'elle [Gabbard] dit”. Trump a même spéculé à tue-tête – la veille de la fuite du 13 juin – qu'une attaque israélienne (contre l'Iran) “pourrait accélérer [la conclusion] d'un accord”. Il ne fait guère de doute que la “chute” soudaine et inattendue de la Syrie a incité les néoconservateurs à imaginer qu'ils pourraient rapidement répéter l'opération en Iran. C'est aussi ce qui explique pourquoi on insiste tant sur l'assassinat du Guide suprême. Mais l'Iran ne s'est pas effondré, et le système iranien s'est rétabli de manière inattendue et rapide. Lorsque les frappes de représailles iraniennes contre Israël ont commencées, le bloc pro-israélien a paniqué et a exercé une pression énorme sur Trump pour que les États-Unis entrent en guerre aux côtés d'Israël.

Cela a confronté Trump à un terrible dilemme : choisir entre Charybde et Scylla, soit s'aliéner sa base électorale MAGA (qui a voté pour lui précisément pour empêcher les États-Unis de s'engager dans une autre guerre sans fin, ce qui risquerait de causer une défaite du Parti républicain aux prochaines élections de mi-mandat), ou s'aliéner ses donateurs juifs ultra-riches (tels que Miriam Adelson, dont l'argent exerce une influence considérable sur le Congrès et dont les ressources sont exploitées par l'État profond pour poursuivre des intérêts communs avec les partisans d'Israël avant tout), qui se retourneraient contre lui.

Une situation qui n'est pas sans rappeler l'Irak, et le rôle de Colin Powell...

*Source : Strategic Culture

Traduit par Spirit of Free Speech

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