Par Andre Damon (revue de presse : WSWS – 4 décembre 2020)*
Vendredi, le New York Times a publié un article démontrant de manière concluante qu’Israël était pleinement informé, et en détail, des plans du Hamas visant à attaquer sa frontière ; plans exécutés le 7 octobre. Ces révélations montrent clairement que les responsables israéliens, sachant parfaitement où et comment le Hamas allait frapper, ont pris la décision délibérée de ne rien faire, dans le but de faciliter l’attaque.
Ces révélations signifient que le gouvernement israélien a permis et encouragé le meurtre de ses propres citoyens et qu’il est responsable des morts survenues ce jour-là. Cette conspiration criminelle visait à fabriquer un prétexte pour un génocide planifié de longue date contre la population de Gaza.
De plus, il est impossible de croire que les États-Unis n’étaient pas informés des plans du Hamas, dans des conditions où non seulement les services de renseignement israéliens, mais encore ceux de l’Égypte étaient prévenus à l’avance de l’attaque. Tout indique qu’il s’agit d’un complot impliquant Israël, le gouvernement Biden et probablement aussi les agences de renseignement britanniques et européennes.
Le Times a publié cet article lundi, alors qu’Israël lançait une nouvelle vague d’attaques sur Gaza au cours d’une visite d’Antony Blinken. La présence du secrétaire d’État américain avait pour but non seulement d’exprimer le soutien des États-Unis à cette nouvelle attaque, mais aussi de gérer la réponse à la divulgation de ce complot.
Le New York Times écrit que:
Le document d'environ 40 pages, auquel les autorités israéliennes ont donné le nom de code 'Mur de Jéricho', décrit, point par point, le type exact d'invasion dévastatrice qui a entraîné la mort d'environ 1 200 personnes.
Le document obtenu par les services de renseignement israéliens «décrit méticuleusement la méthode d'attaque, reflétant exactement les événements réels », rapporte le Times. « Il décrit un assaut intense visant à percer les fortifications de la bande de Gaza, à s'emparer de villes israéliennes et à cibler des bases militaires clés. Ce plan a été mis en œuvre avec une précision alarmante, impliquant une utilisation coordonnée de roquettes, de drones et de forces terrestres».
Le Times écrit encore,
« Le Hamas a suivi le plan avec une précision choquante. Le document prévoyait un barrage de roquettes au début de l’attaque, des drones pour neutraliser les caméras de sécurité et les mitrailleuses automatiques le long de la frontière, et des hommes armés devant se répandre en masse en Israël en parapente, en moto et à pied – tout cela s’est produit le 7 octobre ».
En outre, selon le Times, les responsables de l'armée et des services de renseignement israéliens savaient que le Hamas avait effectué une mission d'entraînement exhaustive d’une journée pour mettre en œuvre le plan dans les moindres détails, trois mois seulement avant l'attaque. Le Times affirme,
« L'entraînement comprenait une simulation d’abattage d’avions israéliens et la prise de contrôle d’un kibboutz et d’une base d'entraînement militaire, avec la mort de tous les cadets. Au cours de l'exercice, les combattants du Hamas ont utilisé la même phrase du Coran que celle qui figurait en tête du plan d'attaque ‘mur de Jéricho’ ».
Tout en reconnaissant qu'Israël était pleinement informé des plans du Hamas, le Times cherche à présenter ces révélations comme un alibi, affirmant sans aucune justification que les responsables israéliens avaient simplement commis une erreur. Le journal écrit,
À la base de tous ces échecs, il y avait une croyance unique, fatalement inexacte, que le Hamas n’avait pas la capacité d’attaquer et n'oserait pas le faire. Cette croyance était, selon les responsables, tellement ancrée dans le gouvernement israélien qu'ils ont ignoré les preuves de plus en plus nombreuses du contraire...
L’incapacité à raccorder les indices fait écho à un autre échec analytique survenu il y a plus de vingt ans, lorsque les autorités américaines disposaient de multiples indications que le groupe terroriste Al-Qaïda préparait une attaque.
Non, la décision israélienne de ne rien faire le 7 octobre n'était pas un échec à 'raccorder les indices' parce qu'il n'y avait pas d’indices à raccorder. Les agences de renseignement israéliennes avaient obtenu le plan opérationnel complet de l'attaque du 7 octobre, puis avaient assisté à un exercice d'entraînement de haut niveau du Hamas en vue de réaliser ce plan. Ils savaient exactement ce qui était prévu et ont décidé de laisser faire.
Le Times écrit: «Les responsables de l’armée et des services de renseignement israéliens ont rejeté le plan comme étant ambitieux, estimant qu'il était trop difficile pour le Hamas de le mettre en œuvre ». Il ajoute: «On ne sait pas si le Premier ministre Benjamin Netanyahou ou d'autres hauts responsables politiques ont vu le document».
Cette présentation est absurde. Il est impossible de croire que des informations de cette nature puissent entrer en possession des agences de renseignement sans provoquer l'analyse la plus intense. L’idée qu’après le 11 septembre, des plans d’un si haut niveau aient été cachés au premier ministre est impensable.
Un tel document sera probablement venu d’une source au plus haut niveau du Hamas. Une fois ces précieuses informations obtenues, il aura sans doute été vital de prendre des mesures pour protéger cette source, y compris des contre-mesures pour faire croire au Hamas qu’Israël n’était pas en possession de ces informations. La suspension de la vigilance aura été le moyen d’envoyer un signal indiquant que le plan du Hamas n’avait pas été dévoilé.
Pour finir, le choix a été fait de permettre à l’opération du Hamas de continuer afin de fournir à Israël un prétexte pour une attaque militaire massive, planifiée de longue date, contre Gaza. Seul Netanyahou pouvait prendre une telle décision. Les États-Unis, quant à eux, ont immédiatement envoyé une force militaire massive dans la région, annonçant le déploiement de leur plus grand porte-avions et navire d’escorte dans la région dans les 24 heures qui ont suivi l’attaque.
Quand le Times affirme que le fait qu’Israël n’ait rien fait est un «échec des services de renseignement» cela n’a aucun sens, car il s’agit d’un mensonge du début à la fin. Non, les événements du 7 octobre n’étaient pas un échec du renseignement: Israël a remarquablement réussi à prédire exactement l’opération militaire du Hamas. Au lieu d’agir sur la base de ces renseignements, Israël a orchestré un retrait de ses troupes et cessé la collecte de renseignements au moment précis où l’attaque a eu lieu.
Quatre jours après l’attaque du 7 octobre, le journaliste chevronné Seymour Hersh a rapporté que dans les jours précédant l’attaque, «les autorités militaires israéliennes locales, avec l’approbation de Netanyahou, ont ordonné à deux des trois bataillons de l’armée, comptant chacun environ 800 soldats, qui protégeaient la frontière avec Gaza, de se concentrer sur le festival de Souccot» qui se déroulait près de la Cisjordanie.
Hersh cite une source qui lui a dit: «Il ne restait plus que huit cents soldats… pour garder la frontière de 51 kilomètres entre la bande de Gaza et le sud d’Israël. Cela signifie que les citoyens israéliens du sud ont été laissés sans présence militaire israélienne pendant dix à douze heures. Ils ont été livrés à eux-mêmes».
Cette cessation d’activité n’a pas seulement rendu la frontière vulnérable aux attaques, elle a encore créé les conditions où des forces militaires ont dû être transférées pour intercepter les attaquants du Hamas dans les zones civiles, créant ainsi une situation où les chars et hélicoptères israéliens ont tiré sans discernement sur les zones civiles, alourdissant encore le bilan des victimes israéliennes.
En plus de la cessation d’activité militaire, Israël avait décidé de mettre son unité de renseignement 8200 hors service les week-ends, ce qui signifie que l’unité de renseignement ayant détecté l’exercice d’entraînement trois mois auparavant n’était pas en service au moment de l’attaque, le samedi 7 octobre.
La révélation qu’Israël avait une connaissance préalable de l’attaque démasque également les médias et l’establishment politique américains. Ils ont pleinement adhéré aux affirmations d’Israël selon lesquelles il avait été pris par surprise et ont prétendu que les événements du 7 octobre justifiaient le génocide en train de se dérouler dans la bande de Gaza.
Ces révélations montrent que le génocide de Gaza est une conspiration criminelle du régime de Netanyahou et de ses soutiens impérialistes, dont les victimes ne sont pas seulement les 20.000 Palestiniens massacrés, mais la population même d’Israël.
(Article paru en anglais le 1er décembre 2023)
*Source: WSWS (World Socialist Web Site)
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