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France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

France-Irak Actualité : actualités du Golfe à l'Atlantique

Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique. Traduction d'articles parus dans la presse arabe ou anglo-saxonne.


Opinion: La révolution en Tunisie, une constituante... et après?

Publié par Gilles Munier sur 5 Novembre 2011, 18:17pm

Catégories : #Tunisie

 

Par Sliman Doggui

Le peuple tunisien s’est rendu massivement aux urnes. Dans le pays, la liberté d’expression est reine. Tous les sujets ont été abordés. Les manifestations se succèdent. Les militants de 106 partis politiques, reconnus par le ministère de l’Intérieur, apprennent à se respecter mutuellement, signe que les Tunisiens commencent à s’accepter les uns les autres. Mais, au-delà de ces avancées vers la démocratie, le problème qui préoccupent aujourd’hui le plus les citoyens, c’est la situation sécuritaire, héritage malsain de la décomposition du système dictatorial.

Pour réaliser les buts de la révolution, il faut expressément juger les personnalités, symboles de l’ancien régime, impliquées dans la répression, dans les malversations et la corruption. Voilà ce qu’exige le peuple. Pour cela, la Justice doit être juste et honnête, que la loi soit appliquée, rien que la loi. Elle ne le sera que si elle est indépendante de l’exécutif, nettoyée de ses éléments pervertis ; que si le Conseil supérieur de la Justice est élu par les juges eux-mêmes, et non plus par le pouvoir, quel qu’il soit,

Le peuple exige que soient recouvrées les fonds détournés par les dirigeants de l’ancien régimes et leurs amis. Le gouvernement tunisien n’y parviendra qu’en liaison, au niveau national et international, avec des organismes de la société civile. Des pressions doivent être exercées sur les pays où se trouve cet argent, sans quoi il ne reviendra pas en Tunisie, ou alors qu’une infime partie.

Chantier prioritaire

Au plan économique, la conjoncture est préoccupante. La croissance économique a chuté de 3,3% . Elle n’est plus que de 0,2%. Les investissements étrangers ont baissé de 17%, les importations de biens d’équipement de 12%. Résultat : le déficit budgétaire es de 4-5%.

La baisse des recettes en devises, due principalement à la dégringolade du secteur touristique, est estimée à 2 000 millions de dinars. Un certain nombre d’investisseurs attendent la suite des événements pour réactiver leurs projets ou en lancer de nouveaux. En raison de la baisse des activités, des entrepreneurs ne peuvent honorer leurs engagements. Le nombre des journées de travail perdues est d’environ 120 000. Heureusement que pour pallier à ces difficultés, l’UGTT, la principale organisation syndicale, a obtenu du gouvernement transitoire des augmentations de salaires. Mais, résorber de façon significative le chômage est une autre affaire. Ce doit être un chantier prioritaire.

En effet, le nombre des chômeurs est en progression. Il tournera autour de 700 000 à la fin de cette année, alors qu’il n’était « que » 490 000 début 2011. A cela, il faut ajouter les 42 000 Tunisiens ayant perdu leur emploi en Libye. Le retrouveront-ils ? Espérons -le, car là bas aussi il est question de sécurité ?

La question du chômage des diplômés des études supérieures posera de gros problèmes aux gouvernements à venir. Ils étaient 140 000 au début 2011, ils seront 65 000 de plus à la fin de l’année universitaire . Or, sur ces chiffres, la fonction publique ne peut résorber annuellement que 20 à 25 000 chômeurs, l’administration étant surpeuplée. En Tunisie, l’administration compte 560 000 fonctionnaires.

Le tissu économique de la Tunisie étant basée sur la sous-traitance, 85% des ouvriers n’ont pas le baccalauréat. Alors, pour employer les diplômés, il faudra investir dans les secteurs de haute technologie. Sur les 32 000 entreprises étrangères installées en Tunisie, il n’y en a que 300 dans le domaine de la recherche.

Les gouvernements à venir seront aussi jugés sur leur aptitude à résorber la pauvreté . En Tunisie, les pauvres - c’est à dire les citoyens ne disposant que de 3 dinars par jour ( 3 euros) pour subsister - sont innombrables, si l’on ne se contente pas des statistiques.

Le peuple tunisien ne se laissera pas abusé

Le rendez-vous électoral du 23 octobre dernier est un succès démocratique unique dans l’histoire de la Tunisie et du monde arabe. Mais, il reste à confirmer en actes. La nouvelle constitution ne répondra pleinement aux espérances des révolutionnaires et des travailleurs qu’en prenant en compte la soif de progrès social et de justice, la nécessité d’éradiquer la corruption. Le recours au référendum doit devenir une des pratiques nouvelles de la Tunisie de demain. Enfin, pour réduire les effets du centralisme administratif qui étouffe les initiatives et favorise les grandes métropoles, des assemblées régionales doivent être créées, seules capables de faire rattraper les retards accumulés dans certaines parties du pays, délaissées par l’ancien régime.

Le peuple tunisien ne se laissera pas abusé. Les Tunisiens vivant à l’étranger, qui contribuent au développement du pays, veulent participer aux réflexions et aux décisions importantes pour l’avenir de leur patrie, notamment en matière de développement économique et social. Tous les patriotes sont conscients des enjeux à venir. Qu’on se le dise : ils ne laisseront pas dénaturer ou trahir les martyrs de la révolution du 14 janvier 2011.

Synthèse actualisée d’une intervention faite le 22 septembre 2011, lors d’une conférence sur les « révolutions arabes », organisée à Paris par l’Appel Franco-Arabe (AFA).

* Sliman Doggui, neurologue, militant nationaliste et des droits de l’homme.

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