Par Gilles Munier
En Algérie, le feuilleton Bouteflika n’amuse personne. Les Algériens ont appris que leur Président de la République était toujours en France … par un communiqué du Quai d’Orsay, puis qu’il avait été transféré de l’hôpital du Val-de-Grâce aux Invalides - où sont soignés les militaires français gravement blessés en Afghanistan et au Mali - …par le ministère français de la Défense. Sur le site TSA (Tout sur l’Algérie), une personnalité politique occidentale « très courtisée » trouvait « inimaginable » que 50 ans après l’indépendance un président algérien ne puisse être soigné dans son pays et que les nouvelles concernant sa santé soient données par des milieux officiels français (1).
Ce n’est pas tout : tandis que le chanteur Enrico Macias, né à Constantine, annonçait du Qatar que « son ami Bouteflika » – à qui il avait rendu visite - était au plus mal, qu’il ne pouvait plus parler, qu’ « il avait très peur pour sa vie » et « pour l’avenir de l’Algérie (2), Mourad Medelci, ministre algérien des Affaires étrangères, affirmait sur RFI (Radio France Internationale) que le Président était en France «en bonne santé… pour quelques jours en convalescence ».
On apprenait ensuite, grâce au quotidien algérien Mon journal et à son pendant arabophone Djaridati, toujours bien informés, qu’Abdelaziz Bouteflika avait été rapatrié en Algérie le 15 mai, dans un « profond coma ». Les deux journaux ont aussitôt été saisis, mais trop tard : l’information avait soulevé à Alger une véritable tempête politique.
Coup de théâtre , le 29 mai : le quotidien Ennahar a publié le fac-similé d’un décret signé à Alger par Bouteflika le 9 Rajab 1434 - correspondant au 19 mai 2013 - et assuré que le Président en avait signé 14 autres ! Et, dans la foulée, Fayçal Oukaci, de Mon Journal, a découvert qu’un avion d’Air Algérie avait bien décollé de l’aéroport du Bourget le 15 mai et était reparti le lendemain matin (3)…
Pour Hicham Aboud, directeur de Mon Journal et de Djaridati, maintenant poursuivi en justice pour « atteinte à la sûreté de l’Etat », les Algériens ont le droit de savoir où est leur Président de la République et quel est son état de santé. Le journaliste ajoute que « tout black-out n’est que mépris pour le peuple qui l’a élu ». C’est le moins que l’on puisse dire.
(1) Santé du Président Bouteflika: quand un diplomate occidental se lâche, par (TSA – 22/5/13). Le site TSA serait proche du général Mohamed Médiène dit « Toufik », chef du DRS, le service secret algérien.
(2) Bouteflika, l'interview d'Enrico Macias sur sa maladie (vidéo : 1’47)
http://www.youtube.com/watch?v=16ev1Ea2on0
(3) L’avion A340-500 enregistré sous CN917 a fait le vol Paris-Alger ! par Fayçal Oukaci (Mon Journal – 28/5/13)
http://www.monjournaldz.com/fr/index.php/archives/3429-n%C2%B0-278.html