Analyses, informations et revue de presse sur la situation en Irak et du Golfe à l'Atlantique.
Traduction d'articles parus
dans la presse arabe ou anglo-saxonne.
Si vous avez aimé les batailles d’Alep, Homs, Tikrit, Sinjar, Ramadi, Falloujah… vous adorerez celle de Mossoul.
Face à 10 à 15 000 djihadistes de l’Etat islamique qui ont eu deux ans pour organiser leur défense, la coalition anti-Daech aligne 50 000 soldats gouvernementaux, 20 000 peshmerga, une force d’environ 10 000 miliciens comprenant des Turkmènes et des Assyriens, et Hashd al-Watani, des volontaires de tribus sunnites locales commandés par Atheel Nujaifi , ancien gouverneur de la province de Ninive, réfugié au Kurdistan.
« Cibler » aussi les troupes américaines…
A cette impressionnante coalition militaire, il faut ajouter les milices chiites d’Hashd al-Shaabi, fortes de plusieurs milliers de combattants soutenus par l’Iran. Leur chef, Hadi al-Amiri, vient de déclarer qu’elles participeront à l’offensive.
Saraya al-Salam, les Brigades de la paix de Moqtada al-Sadr ne seront pas en reste, mais marqueront leur différence : le leader religieux a ordonné à ses hommes de « cibler » également les troupes américaines présentes dans la région (environ 4 600 « conseillers militaires », sans compter les forces spéciales et les « contractors »)…
Près de 100 000 soldats vont donc se lancer à l’assaut de Mossoul, un nombre équivalent à celui des troupes gouvernementales qui se sont débandées, en juin 2014, lors de l’entrée des djihadistes dans la ville. On sait maintenant qu’ils étaient 106 0000, du moins sur les fiches de paye… Le 1er aout dernier, Khalid al-Obeidi, ministre irakien de la Défense (sunnite), les a tous licenciés , ce qui va exacerber un peu plus les tensions au sein de la communauté chiite.
« Libération » ou nouvelle « occupation » ?
On se souvient que la population de Mossoul avait accueilli les djihadistes en libérateurs, ne faisant pas la différence entre ceux appartenant à Daech et à l’Armée des hommes de la Naqshbandiyya, proche du parti Baas clandestin d’Izzat Ibrahim al-Douri. Pour les mossouliotes, l’important était d’être débarrassé des forces gouvernementales qui se comportaient en occupants et en racketteurs. A l’époque, il était encore question de proclamer un Gouvernements provisoire de la République irakienne. Mais, Daech a pris le dessus et imposé sa loi, sans partage.
Un exode massif
En mars, le compte à rebours a commencé. Des avions irakiens ont largué des millions de tracts sur la province d’Al-Anbar pour prévenir la population que l’heure de la « libération » était proche. Le « Commandement militaire opérationnel de la région de Ninive » a diffusé un prospectus comportant 19 directivesconseillant aux habitants de Mossoul et de ses environs de stocker de l’eau et de la nourriture, d’avoir un éclairage de secours, d’éviter de circuler en automobile, et d’écouter les radios des forces gouvernementales plutôt que celles de « l’ennemi ».
L’annonce faite par le Pentagone que des B-52 surnommés « Big Ugly Fat Fella' » (BUFF) - pour « Gros Salaud Gras et Moche » - participeront aux bombardements dits ciblés n’a évidemment rassuré personne. On estime à 1 million le nombre d’habitants résidant encore à Mossoul. Comment réagiront-ils à l’entrée des troupes de la coalition dans leur ville ? Certainement pas en leur offrant des fleurs. L’exode des populations de la région de Ninive est déjà important. Le Jour J, il sera massif.
L’issue des combats ne fait aucun doute : Mossoul sera reconquise, mais à quel prix et pour quoi faire ensuite ? Aucun projet sérieux de réconciliation n’est proposé par les assaillants. Ce qui est sûr, c’est que la bataille ne signera pas la disparition de l’Etat islamique, du moins sous sa forme actuelle.